Il ne reste plus beaucoup de prise au président sud-coréen, Yoon Suk Yeol, pour s’accrocher au pouvoir, après sa brusque tentative ratée d’imposer la loi martiale dans le pays. Alors que le Parlement doit voter la destitution du chef d’Etat, le leader de son propre parti lui a retiré son soutien.
« Si le président Yoon continue d’occuper le poste de président, il existe un risque important que des actions extrêmes similaires à la déclaration de la loi martiale soient répétées, ce qui pourrait mettre la République de Corée [nom officiel de la Corée du Sud] et ses citoyens en grand danger », a déclaré, vendredi 6 décembre, Han Dong-hoon, chef du Parti du pouvoir au peuple (PPP). « Au vu de nouveaux éléments, je crois qu’une suspension rapide du président Yoon Suk Yeol est nécessaire afin de sauvegarder la République de Corée et sa population », a-t-il ajouté.
Yoon Suk Yeol avait proclamé par surprise la loi martiale tard mardi et fait déployer l’armée à Séoul. Il avait expliqué avoir déclaré cet état d’exception pour protéger « la Corée du Sud libérale des menaces des forces communistes nord-coréennes et pour éliminer les éléments hostiles à l’Etat », dans un contexte de bras de fer sur l’adoption du budget 2025. Il avait été obligé de rétropédaler six heures plus tard après un vote du Parlement réclamant à l’unanimité la levée de loi martiale, et sous la pression de la rue.
Il ne manque que huit voix du parti présidentiel pour la destitution
Dans son discours en forme de réquisitoire, M. Han a évoqué, vendredi, des « preuves crédibles » que le président avait ordonné l’arrestation de dirigeants politiques de premier plan dans la nuit de mardi à mercredi. « Le président Yoon Suk Yeol a demandé au chef du commandement du contre-espionnage (…) d’arrêter des politiciens importants, en les qualifiant de forces anti-étatiques, et a mobilisé les agences de renseignement » pour le faire, a-t-il affirmé.
Si M. Yoon ne démissionne pas d’ici là, le vote au Parlement sur la destitution du président est prévu samedi 7 décembre à 19 heures locales (11 heures, heure de Paris), selon l’agence nationale Yonhap. Jeudi, Han Dong-hoon avait affirmé que le parti présidentiel ferait front contre la motion, mais ce changement de discours semble garantir son succès, alors que l’opposition, majoritaire au Parlement, n’a besoin de rallier que huit élus du PPP.
Si le Parlement approuve, aux deux tiers – 200 voix sur 300 membres –, la destitution de M. Yoon, ce dernier sera suspendu, dans l’attente que la Cour constitutionnelle valide sa destitution. Une nouvelle élection présidentielle devra alors être organisée dans les soixante jours. La cote de popularité de Yoon Suk Yeol a atteint un plus bas de 13 %, selon un sondage Gallup publié vendredi.
Visé par une enquête pour rébellion
Le président n’a pas été vu en public depuis son annonce de la levée de la loi martiale aux premières heures mercredi. Il est visé par une enquête pour « rébellion », a dit la police jeudi. « C’est un crime impardonnable, qui ne peut pas, ne doit pas et ne sera pas pardonné », a tonné Kim Seung-won, député du Parti démocrate, principale composante de l’opposition.
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Ce crime est théoriquement passible de la peine de mort, qui n’est cependant plus appliquée en Corée du Sud depuis 1997.
Les manifestations de milliers de Sud-Coréens devant les lieux de pouvoir se multiplient depuis mercredi pour réclamer le départ de M. Yoon.
Jeudi, son cabinet a annoncé la démission du ministre de la défense, Kim Yong-hyun. Mais d’autres responsables clés de son gouvernement s’accrochent, dont le ministre de l’intérieur, Lee Sang-min. L’opposition cible également d’autres alliés de poids de M. Yoon, dont l’éphémère commandant de la loi martiale, Park An-su, chef d’état-major de l’armée.