C’est le mystère dans le mystère. Qui, de Donald Trump ou Kamala Harris, profite davantage du vote anticipé pour l’élection présidentielle du 5 novembre ? Déjà plus de 78 millions d’Américains ont voté, avant même le jour du scrutin. Voilà la particularité des élections aux Etats-Unis, pays en campagne permanente, où le vote lui-même s’étire sur des semaines. Parmi les Etats où les procédures anticipées ont été le plus utilisées – par courrier, vote en personne, dépôt du bulletin dans des urnes spéciales, etc. – figurent le Texas, mais aussi trois des sept Etat-pivots où se jouera la victoire finale : le Nevada, la Caroline du Nord et la Géorgie. Dans ce dernier Etat, déjà 80 % de l’électorat s’est prononcé, si on prend comme chiffre de référence la participation de 2020.
Ce scrutin tenu il y a quatre ans en pleine épidémie du Covid-19 fut une sorte d’anormalité historique. Sur les 158 millions de votants, les deux tiers avaient voté en avance. En 2012 et 2016, cette part s’élevait à 36 %. On devrait revenir à un niveau plus classique mais tout de même élevé en 2024. « Le pari le plus sûr consiste à dire qu’on aura environ 50 % des bulletins, peut-être légèrement plus, déposés avant le jour de l’élection », souligne Tom Bonier, président de la société d’analyse TargetSmart.
Ce stratège démocrate travaille depuis de longues années sur les données brutes et objectives du vote anticipé, alors que les commentateurs privilégient à tort les sondages. « Ce qui retient le plus notre attention dans l’analyse de ces données est une question : quel camp génère le plus de nouveaux électeurs, dans le vote anticipé ? Or on s’aperçoit que les républicains convertissent cette fois beaucoup d’électeurs, qui s’étaient déplacés en 2020 le jour même du scrutin, en électeurs anticipés. C’est juste une modification du timing de vote, pas un indice d’enthousiasme. »
En retard d’une bataille
Les républicains se réjouissent déjà. Cette fois, Donald Trump n’a pas dissuadé ses partisans de voter par anticipation, alors qu’il avait dénoncé ces procédures il y a quatre ans comme étant le véhicule des fraudes démocrates, parfaitement imaginaires. La mobilisation pour combler le déficit énorme par rapport aux démocrates, constaté en 2020, a porté ses fruits. Si l’on observe les Etats où l’adhésion à un parti est publique pour les électeurs, les deux formations sont quasiment à un niveau égal. Mais selon Tom Bonier, les républicains seraient en retard d’une bataille : les démocrates ont l’avantage en matière de nouveaux inscrits sur les listes, en particulier dans les Etats-pivots. « Si on étudie le profil de ces nouveaux inscrits à compter de juillet et l’entrée en lice de Kamala Harris, il s’agit dans une écrasante majorité de jeunes, de femmes, de personnes de couleur, qui traditionnellement votent beaucoup plus pour les démocrates. »
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