« Je n’ai plus rien pour vivre, j’y ai investi beaucoup d’argent personnel », se tourmente Virgile Mulac. Pour l’entrepreneur de 44 ans, le couperet est tombé le 31 juillet : sa start-up, Sysalp, spécialisée dans la construction de distributeurs de vrac et vieille de deux ans, a été placée en liquidation judiciaire par le tribunal de commerce de Grenoble. Depuis, le fondateur vit « sur [ses] économies » et doit « trouver un travail en urgence ».
Ses machines de vrac censées être installées dans les magasins de la grande distribution n’ont pas eu le succès escompté. « L’inflation a tout ruiné, les consommateurs ont délaissé le bio et le vrac. Forcément, les grandes enseignes ne nous commandaient pas de produits », explique M. Mulac. Alors qu’il a réalisé 115 000 euros de chiffre d’affaires en 2023, grâce à ses premiers essais en magasin, la start-up n’a généré « quasiment aucun revenu en 2024 ».
En juin, il tente de faire appel à des investisseurs, sans succès, la période estivale étant peu propice aux levées de fonds. S’il a fait le « deuil de ce qu’aurait pu devenir l’entreprise », il espère que Sysalp trouvera un repreneur rapidement.
Une « conjoncture ralentie »
Comme cette start-up, ce sont 5 800 sociétés qui ont été déclarées en cessation de paiements en juillet, c’est-à-dire dans l’incapacité de rembourser leurs dettes. Les défaillances ont augmenté de 25,2 % sur un an, d’après les données de la Banque de France. « C’est le mois de juillet le plus lourd de notre histoire », affirme Thierry Millon, directeur des études du cabinet Altares.
Et la vague ne fait qu’enfler depuis des mois. En août, le nombre de défaillances était encore en hausse de 23,8 % sur un an et de 6 % par rapport à la moyenne enregistrée entre 2010 et 2019, selon de la Banque de France. Et, sur un an, le nombre grimpe à 62 893 entreprises.
Selon Altares, « trois quarts des défauts » concernent des structures de moins de trois salariés, mais le phénomène s’accélère dans les entreprises de l’échelon supérieur. Les défaillances « augmentent deux fois plus vite que la moyenne » pour les petites et moyennes entreprises (PME) de 50 à 99 employés. En cause, selon le cabinet, une « conjoncture ralentie » et un « rattrapage d’une partie des défauts évités pendant la crise sanitaire ». L’accumulation des confinements et des crises inflationniste et immobilière ont fragilisé les plus petites sociétés, laissant plusieurs milliers de salariés sur le carreau.
Le bâtiment et l’immobilier sont les secteurs les plus touchés par les défaillances. Au deuxième trimestre, 4 350 entreprises de construction ont été placées en redressement judiciaire (poursuite d’une activité possible) ou en liquidation judiciaire (fin totale de l’activité). Au 30 juin, 30 000 salariés ont perdu leur travail depuis le début de l’année. « Le nombre de permis de construire a chuté de 30 % en trois ans, c’est dramatique », se désole Olivier Salleron, président de la Fédération française du bâtiment (FFB). La hausse des « prix de l’énergie » et des « taux des crédits » ont fortement « handicapé » le secteur, notamment dans la construction de logements neufs.
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