Le monde des revues scientifiques au bord de l’asphyxie

3721


Alerte. L’un des piliers de la recherche scientifique est en train de trembler, se fissurer, voire menace de s’effondrer. Ce pilier, c’est l’article de recherche, sélectionné et évalué par des journaux ou des revues scientifiques. C’est par ce biais qu’Albert Einstein explique sa théorie de la relativité restreinte en 1905 (dans les Annalen der Physik). Ou qu’Alexander Fleming, en 1929, décrit l’action de la pénicilline (dans le British Journal of Experimental Pathology). Ou encore que James Watson et Francis Crick décrivent la structure de l’ADN en 1953 (dans les colonnes de la revue Nature).

Ce qui est remis en question n’est pas l’article lui-même, quoiqu’il se transforme aussi, mais la place qu’il occupe dans le paysage savant, la manière dont il est distribué, évalué ou « consommé ». L’article de recherche a en effet changé de nature. « Il n’est plus une unité de connaissance, mais est devenu une unité d’évaluation », a rappelé Philippe Huneman, chercheur à l’Institut d’histoire et de philosophie des sciences et des techniques au CNRS, lors de l’Agora sciences université recherche. Réunie les 16 et 17 juin à Paris pour « refonder l’université et la recherche », elle a consacré une session à ce sujet. « C’est une machine à transformer de la connaissance en gains symboliques et financiers. L’article est donc au cœur du système de recherche et la source de nombreux problèmes », a-t-il précisé.

Il n’est plus seulement, comme il l’a longtemps été, l’aboutissement d’un travail : il est devenu tout à la fois la raison d’être de cette activité, la manière d’en mesurer la productivité, l’étalon qui distingue les bons chercheurs et les moins bons, le sésame qui fait les carrières. Et, depuis quelques années, cette centralité cause des emballements malheureux. Trop d’articles, trop chers et de trop mauvaise qualité, circulent… Et l’arrivée de l’intelligence artificielle ne fait qu’amplifier ces défauts.

Il vous reste 90.1% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.



Source link