le maintien de l’ordre à la française, une sorte d’exception culturelle

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Livre. La question du maintien de l’ordre, en France, a pris une acuité particulière depuis les manifestations des « gilets jaunes », fin 2018, et, plus récemment, avec l’explosion des violences urbaines après la mort du jeune Nahel M., tué par un tir policier, le 27 juin, à l’occasion d’un contrôle routier après un refus d’obtempérer. Abcès de fixation du débat sécuritaire en France, elle fait régulièrement l’objet de prises de position publiques, d’études, de rapports. Les pouvoirs publics, pourtant, semblent éprouver des difficultés grandissantes à trouver le juste équilibre entre préservation des libertés individuelles et maintien de la paix publique.

Dans La Police contre la rue (Grasset, 320 pages, 22 euros), Sebastian Roché, universitaire spécialiste des questions de police, et François Rabaté, réalisateur et politologue, balaient le sujet à 360 degrés en complétant leurs propres analyses par les commentaires d’acteurs et d’observateurs avisés : un syndicaliste policier ancien CRS, un général de gendarmerie, des universitaires ou encore Michel Delpuech, préfet de police de Paris entre 2017 et 2019. Si l’ouvrage revient sur les invariants de cette discipline en France (comme le recours aux lanceurs de balles de défense, par exemple), en écornant au passage le lieu commun d’un domaine d’excellence française, il présente surtout le mérite d’offrir une analyse comparée des doctrines en vigueur à l’étranger.

« Des ordres pas toujours cohérents »

En France, notent les auteurs, à l’unisson des commentateurs invités à exprimer leurs opinions, le péché originel du maintien de l’ordre tient sans doute à sa dimension très politisée, marquée par « l’alignement des préfets, à commencer par celui de Paris, sur les instructions opérationnelles (…) du ministre ». De là, des ordres qui « ne sont pas toujours très cohérents », note le général de gendarmerie Bertrand Cavallier, considéré comme l’un des meilleurs spécialistes du sujet.

En Allemagne, au contraire, la structure fédérale de l’Etat donne la primauté à une gestion des foules locale, au plus près des événements et du contexte particulier d’une manifestation. Au Royaume-Uni, le « chef de police » n’est pas responsable de ses actes devant le ministre de l’intérieur mais doit rendre des comptes aux instances locales. Est-ce pour autant le gage d’une action efficace et juste ? Assurément pas, mais du moins cette vision moins centralisée et plus ouverte de l’action policière conduit-elle, chez nos voisins, à de constants réajustements doctrinaux.

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