Le débat autour de la fin de vie revient à l’Assemblée avec deux textes distincts sur les soins palliatifs et l’« aide à mourir »

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L’hémicycle de l’Assemblée nationale, à Paris, le 12 mars 2025.

Dix mois après avoir vu son examen interrompu par la dissolution de l’Assemblée nationale, le texte sur la fin de vie y fait son retour, mercredi 9 avril, scindé en deux propositions de loi, l’une portant sur les soins palliatifs et l’autre, sur l’« aide à mourir ».

Les députés entament ce matin en commission des affaires sociales l’examen des deux textes, portés respectivement par Annie Vidal (Renaissance) et Olivier Falorni (MoDem), en commençant par l’audition des ministres compétents, Catherine Vautrin et Yannick Neuder.

Malgré l’opposition d’une partie du camp présidentiel, dont la présidente de l’Assemblée, Yaël Braun-Pivet, qui souhaitait conserver un seul texte, le premier ministre, François Bayrou, a imposé cette scission, afin selon lui de permettre à tous de « pouvoir voter sur chacun de ces deux textes différemment ».

Intenses controverses concernant le suicide assisté

Si la proposition de loi sur les soins palliatifs, globalement consensuelle, devrait être adoptée sans difficulté, la seconde, qui légalise le suicide assisté – et, dans certains cas, l’euthanasie – suivant de strictes conditions et sans employer ces termes, devrait donner lieu à d’intenses controverses.

« Notre responsabilité est grande : répondre aux souffrances sans brusquer les consciences », avait souligné en mai la ministre de la santé, Catherine Vautrin, défendant la nécessité de conserver dans le texte le bon « équilibre » sur un sujet complexe, qui touche à l’intime et transcende les clivages politiques. Deux votes solennels sont prévus de manière simultanée le 27 mai, une manière selon M. Falorni de contrer d’éventuelles tentatives d’obstruction.

Les deux propositions de loi sont un quasi copié-collé du projet de loi relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie, défendu au printemps 2024 par Mme Vautrin, dans l’état où il se trouvait au moment de la dissolution de l’Assemblée. Au terme de deux semaines de discussions dans l’Hémicycle, les députés étaient allés jusqu’à son article 7.

Ils avaient notamment voté son article clé et décidé de créer un droit à une aide à mourir conditionné à cinq critères : être âgé d’au moins 18 ans ; être français ou résider en France ; être apte à manifester sa volonté de façon libre et éclairée ; être atteint d’une « affection grave et incurable, qui engage le pronostic vital, en phase avancée ou terminale » ; cette dernière doit provoquer une « souffrance physique ou psychologique » réfractaire aux traitements ou insupportable.

Une définition différente de ce que proposait le texte initial du gouvernement, qui prévoyait que ce pronostic vital soit engagé « à court ou moyen terme » – la difficulté étant de savoir ce que recouvre cette notion de « moyen terme ». Un avis de la Haute Autorité de santé sur le sujet est attendu, qui devrait être publié au début de mai, selon une source parlementaire, avant le début de l’examen dans l’Hémicycle, prévu le 12 mai.

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Autres points qui devraient susciter de vifs débats : la question des directives anticipées, certains considérant, comme Mme Vautrin, que le patient doit jusqu’au moment du geste létal être capable d’exprimer son consentement ; la collégialité ou non de la décision – le texte prévoit pour l’instant que celle-ci soit prise par un seul médecin, ce que conteste Yannick Neuder.

Deux votes solennels le 27 mai

Pour le député LR Thibault Bazin, très impliqué sur cette question, le texte de M. Falorni « ne correspond plus à l’équilibre affiché » par le gouvernement dans son projet de loi initial, et son adoption est incertaine, alors que chaque groupe laissera la liberté de vote à ses membres. M. Falorni estime au contraire que les députés sont parvenus à un « équilibre satisfaisant » et espère que son texte va recueillir une « majorité de suffrages ».

Engagé de longue date pour une fin de vie « libre et choisie », il met en garde les parlementaires qui se livreraient au « petit jeu de l’obstruction » pour empêcher son texte d’aboutir, comme ce fut le cas en 2021, lors de l’examen d’une proposition de loi sur le sujet dont il était déjà le premier signataire. « Ils seraient très mal jugés par l’opinion publique », estime-t-il, alors que la légalisation d’une forme d’aide à mourir était une promesse de campagne d’Emmanuel Macron en 2017.

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Le Monde avec AFP

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