La crise diplomatique entre le Canada et l’Inde, déclenchée il y a plus d’un an, est entrée, lundi 14 octobre, dans une phase aiguë avec l’expulsion réciproque de hauts diplomates. Cette escalade spectaculaire est intervenue quelques heures après les révélations de la police fédérale canadienne annonçant détenir des « éléments de preuve crédibles et irréfutables » sur « l’implication d’agents du gouvernement de l’Inde dans des activités criminelles graves au Canada », des « activités clandestines telles que la collecte de renseignements » et « l’ingérence dans les processus démocratiques ».
La ministre canadienne des affaires étrangères, Mélanie Joly, a précisé dans un communiqué avoir demandé à New Delhi de lever l’immunité diplomatique de six de ses agents, dont l’ambassadeur, afin qu’ils puissent être interrogés sur « un certain nombre d’incidents violents visant des membres de la communauté sud asiatique, en particulier de la communauté sikh, dans de nombreuses villes du pays ». New Delhi ayant refusé, ils ont reçu un avis d’expulsion. L’Inde affirme qu’ils ont été rappelés.
Les accusations sont extrêmement graves et font suite à l’assassinat en juin 2023 d’un dirigeant séparatiste sikh sur le sol canadien. Hardeep Singh Nijjar avait été abattu sur le parking du temple sikh qu’il dirigeait à Surrey, dans la banlieue de Vancouver (Colombie-Britannique). Ce citoyen canadien militait pour la création d’un Etat sikh indépendant dans le nord de l’Inde, le Khalistan.
Ottawa avait rapidement désigné l’Inde. Le 18 septembre 2023, le responsable de l’agence de renseignement extérieur indienne, la Research and Analysis Wing (RAW), Pavan Kumar Rai, avait été expulsé du Canada. En novembre 2023, un événement avait donné du poids au scénario canadien : la justice américaine avait à son tour accusé un agent de RAW d’avoir recruté un homme de main pour tenter d’assassiner Gurpatwant Singh Pannun, un séparatiste sikh de nationalité américaine. Le complot avait échoué.
« Stratégie de diffamation »
La police et les autorités canadiennes soupçonnent désormais les agents indiens d’être impliqués dans d’autres actes criminels et violences. Selon le Washington Post, l’Inde a mis en place une « chaîne opérationnelle dans laquelle les diplomates indiens au Canada recueillent des renseignements sur les séparatistes sikhs présumés, qui sont ensuite utilisés par la RAW pour identifier des cibles pour des attaques menées par un gang criminel dirigé par Lawrence Bishnoi, emprisonné en Inde, dont l’organisation est très active au Canada ».
Il vous reste 57.48% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.