Le Brésil décriminalise la possession individuelle du cannabis

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Lors d’une manifestation pour la dépénalisation de l’usage du cannabis, à Sao Paulo (Brésil), le 17 juin 2023.

La décision était attendue depuis une décennie. Mardi 25 juin, les juges du Tribunal suprême fédéral (STF), plus haute juridiction du Brésil, ont mis fin à un très long suspense et décrété la décriminalisation du cannabis à usage personnel. La possession de marijuana est désormais considérée comme une simple infraction, passible d’un avertissement délivré par la police.

Huit des onze magistrats de l’institution ont voté en faveur de la décriminalisation, mettant fin à une procédure commencée en 2015. Pour les juges, il s’agissait de statuer sur la constitutionnalité d’une loi adoptée en 2006, considérant comme un crime l’acquisition, la conservation ou le transport de tout type de drogue pour une consommation personnelle. Après examen, le STF a finalement décidé de limiter le débat au seul cannabis.

La loi de 2006 ne punissait pas de peines de prison l’usage personnel de drogue, préférant des mesures éducatives et des services d’intérêt général. Mais le texte ne définissait pas à partir de quelle quantité de cannabis un individu pouvait être considéré comme un simple usager ou un trafiquant de drogue, risquant ainsi cinq à vingt ans de prison. En l’absence de critères objectifs, l’appréciation était laissée aux policiers et aux juges.

Selon ses détracteurs, le texte était ainsi à l’origine de nombreuses discriminations. « Si [l’individu] est noir, pauvre et habite dans les périphéries, alors il est considéré comme un trafiquant. S’il est riche et blanc, alors il est considéré comme un usager », a résumé, sur le réseau X, Erika Hilton, députée socialiste, par ailleurs trans et noire, qui s’est réjouie de la décision des juges. Mercredi 26 juin, ces derniers ont fixé à 40 grammes la quantité maximale de cannabis autorisée pour un usager.

Les réserves du président Lula

Le jugement a déclenché la furie du camp conservateur. « La décriminalisation de la marijuana est une tragédie pour les familles et les jeunes du Brésil », s’est insurgé Altineu Côrtes, député du Parti libéral (PL, extrême droite), accusant les juges d’avoir outrepassé leurs fonctions. « Le [STF] doit exercer son rôle, qui est très important, mais ne doit jamais légiférer à la place du Congrès », a insisté M. Côrtes, porte-voix des évangéliques radicaux.

L’élu a été écouté : dans la foulée de la décision du STF, le président de la Chambre des députés, Arthur Lira (Parti des progressistes, PP, droite), a annoncé l’instauration d’une commission spéciale chargée d’étudier l’inscription dans la Constitution de la criminalisation du port, de la possession et de l’usage de drogue. Une proposition saluée par le président du Sénat, Rodrigo Pacheco (Parti social démocratique, centre) : « En décriminalisant la marijuana, le Tribunal suprême fédéral a créé un vide et brisé la logique juridique », a dénoncé ce dernier.

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