
Emmanuel Macron a convoqué, mardi 18 novembre, à l’Elysée, en présence du premier ministre, Sébastien Lecornu, et de plusieurs ministres, une réunion « sur la mise en œuvre de la loi narcotrafic ». Les ministres Gérald Darmanin (justice), Laurent Nuñez (intérieur), Jean-Noël Barrot (affaires étrangères) et Amélie de Montchalin (comptes publics), ainsi que le procureur de la République de Marseille, Nicolas Bessone, le directeur général de la police nationale et de la police judiciaire, étaient également autour de la table, a fait savoir l’Elysée, confirmant une information de Franceinfo.
A l’issue de ce rendez-vous consacré au narcotrafic, le ministre de l’intérieur s’est exprimé au micro de BFMTV. « Nous avons fait un point sur la criminialité organisée à Marseille, et plus généralement sur le territoire », a déclaré Laurent Nuñez. Tous les participants ont qualifié l’assassinat de Mehdi Kessaci, intervenu le 13 novembre à Marseille, non pas « d’un règlement de compte classique, mais d’un crime d’intimidation », a fait savoir le ministre.
« C’est un meurtre préparé totalement inédit, un véritable point de bascule », a-t-il poursuivi expliquant que « les trafiquants sont de plus en plus à cran à cause des actions que nous menons. Ils ripostent car nous portons des coups sévères et très durs au trafic ; ce crime en fait partie ».
Jeudi 13 novembre, le frère du militant écologiste Amine Kessaci, engagé dans la lutte contre le narcobanditisme, a été abattu par balle à Marseille. Le procureur Nicolas Bessone n’a pas exclu un assassinat d’avertissement. Selon une source proche du dossier, le chef de l’Etat a lui-même appelé au téléphone le militant écologiste, dont un autre frère, Brahim, avait aussi été tué en 2020.
Lors de cette réunion, le président de la République, a demandé à tous les participants de poursuivre et amplifier cette lutte « qui est la nôtre », a encore dit Laurent Nuñez. Emmanuel Macron se rendra par ailleurs à Marseille « à la mi-décembre » pour refaire un point, a fait savoir le ministre, qui sera également sur place ce jeudi, accompagné du ministre de la justice, Gérald Darmanin.
Laurent Nuñez a tenu à conclure le petit point presse sur le perron de l’Elysée en rappelant que « s’il n’y avait pas de consommateurs, il n’y aurait pas tout ça, tous ces drames, tous ces crimes, tous ces trafics ».
Les obsèques de Mehdi Kessaci doivent avoir lieu mardi après-midi à Marseille. La famille souhaite qu’elles se déroulent sans la présence de la presse et précise qu’une marche blanche se tiendra le week-end prochain. Ces deux évènements seront sous protection policière, a fait savoir le ministre de l’intérieur.
Création du Parquet national anticriminalité organisée
Par ailleurs, à Grenoble, un jeune adolescent a par ailleurs été touché dans la nuit de samedi à dimanche par trois balles près d’un point de vente de drogue, et était toujours dans le coma lundi. Ses agresseurs sont en fuite. Le mineur était connu, dans les fichiers de police, sous « diverses identités » pour trafic de stupéfiants, selon le parquet de Grenoble.
La réunion devait aussi porter, selon l’Elysée, sur la « mise en œuvre » et « la montée en puissance » de la loi narcotrafic, qui a été promulguée en juin. Celle-ci prévoit entre autres « l’installation du Parquet national anticriminalité organisée (Pnaco) qui sera officiellement créé le 1er janvier [2026] », précise l’Elysée. Ce nouveau parquet sera compétent sur les dossiers les plus graves et complexes en matière de crime organisé, sur le modèle du Parquet national antiterroriste et du Parquet national financier.
Le ministre de la justice avait défendu au Parlement la loi sur le narcotrafic, qui comprenait aussi des mesures répressives, des outils pour les enquêteurs, et la création de quartiers de haute sécurité dans des prisons pour y placer à l’isolement les narcotrafiquants les plus dangereux.
Gérald Darmanin a estimé, vendredi 14 novembre, que le drame survenu à Marseille constituait « un point de bascule effrayant qui [devait] faire prendre conscience du danger de cette mafia du narcobanditisme à l’ensemble de la société française ».
« Un véritable fléau », selon Fabien Roussel
A quatre mois des municipales, le thème s’invite dans la campagne électorale. Le candidat Rassemblement national (RN) à la mairie de Marseille, Franck Allisio, a ainsi réclamé « l’état d’urgence » dans la ville, une mesure qui donne davantage de pouvoir aux préfets pour interdire certains rassemblements ou décider de perquisitions administratives. Et sur X, la présidente du groupe RN à l’Assemblée nationale, Marine Le Pen, a appelé « l’exécutif à se ressaisir » face aux « gangs qui ensanglantent la France ».
Le thème devrait aussi être abordé au congrès de l’Association des maires de France (AMF) cette semaine à Paris. La loi narcotrafic est « une bonne loi » mais « au-delà des affichages ou des réunions d’urgence, ce qu’il faut maintenant, c’est l’exécution des choses », a réclamé son président, David Lisnard, sur BFM-TV. L’AMF avait déjà organisé une table ronde sur le narcotrafic en 2024 car « cette réalité, nous la vivons dans les grandes villes, les villes moyennes mais aussi les villages », a souligné le maire Les Républicains de Cannes.
Une priorité partagée par des élus de tous bords. « C’est un véritable fléau », a reconnu sur RTL le secrétaire national du Parti communiste et maire de Saint-Amand-les-Eaux (Nord), Fabien Roussel. « Mais ce n’est pas la police municipale qui pourra lutter contre les narcotrafiquants. Si Emmanuel Macron sort de cette réunion avec un communiqué de presse, mais sans aucun moyen d’urgence consacré aux services de l’Etat, c’est du vent », a-t-il prévenu.


















