l’Assemblée nationale vote une proposition de loi pour restreindre davantage le droit du sol

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A Mayotte le 20 décembre 2024, après le passage du cyclone Chido.

Dans le cadre de la niche parlementaire des Républicains (LR), l’Assemblée nationale a adopté, jeudi 6 février, la proposition de loi visant à restreindre le droit du sol à Mayotte. Le texte a été adopté par 162 voix contre 93, après une séance tendue marquée par les suspensions de séance et les rappels au règlement. Le ministre de la justice, Gérald Darmanin, a salué dans la foulée « une grande avancée pour lutter contre l’immigration irrégulière qui désorganise profondément ce magnifique archipel français ».

Si depuis 2018, une dérogation au droit du sol existe déjà dans l’archipel, le texte des Républicains vise à élargir les restrictions à l’obtention de la nationalité française pour les enfants nés sur l’archipel. La proposition de loi du député LR de la Manche, Philippe Gosselin, établissait que l’obtention de la nationalité française pour les enfants nés à Mayotte soit conditionnée à la résidence régulière sur le sol français, au moment de la naissance, des « deux parents » (et non plus d’un seul), et ce depuis un an (et non plus trois mois).

Mais à la surprise générale, un amendement UDR, le groupe d’Eric Ciotti allié du Rassemblement national, a été adopté dans l’après-midi pour tripler la durée de résidence nécessaire, à trois ans. Une douzaine de socialistes, trois écologistes et un communiste ont voté pour, et cinq RN ont voté contre, alors qu’ils souhaitaient tous faire l’inverse, provoquant de nombreux rappels aux règlements des « insoumis » pour réclamer un nouveau scrutin sur cet amendement. Mais lors de la seconde délibération, une majorité des députés n’ont pas souhaité revenir sur ce vote.

M. Gosselin avait pourtant estimé que l’adoption de cet amendement était une « décision très mauvaise », arguant que seul le délai d’un an pouvait passer le filtre du Conseil constitutionnel. Le ministre de la justice, Gérald Darmanin, a, lui, affiché son souhait que le délai revienne à an durant la navette législative. « Nous ne faisons aucune confiance dans (la) capacité [de Gérald Darmanin] de mener à bien les choses » au Sénat, a lancé, dépité, le président du groupe socialiste, Boris Vallaud.

La proposition de loi avait été élaborée avant le passage du dévastateur cyclone Chido sur l’archipel. Mais celui-ci a ravivé les débats sur l’immigration dans le département de l’océan Indien. Le texte porté par LR est « bienvenu » et « très intelligent », a notamment salué le député macroniste Mathieu Lefèvre, car il ne nécessite pas de modification constitutionnelle, contrairement à une suppression totale du droit du sol.

La gauche unie pour dénoncer le texte

M. Darmanin a rappelé être favorable à son abolition, à l’avenir, pour l’archipel, rappelant que le droit du sol n’a été instauré qu’en 1993 à Mayotte. Abolition aussi demandée par le RN, qui avait déposé un amendement – rejeté – en ce sens. « Nous allons certes voter cette loi », mais « c’est un signal pas suffisant », a jugé Marine Le Pen. Il faut « faire cesser cet appel d’air de l’immigration clandestine », a-t-elle ajouté.

Au lendemain du vote de la motion de censure sur le projet de loi de finances, qui a mis en lumière les divisions au sein du Nouveau front populaire, les députés de gauche se sont montrés cette fois unis jeudi pour dénoncer la proposition de loi. « Vous allez adopter une mesure qui est indécente et qui ne respecte pas les valeurs de la France », a notamment fustigé l’écologiste Dominique Voynet, qui a dirigé l’Agence régionale de santé de Mayotte de 2019 à 2021. « Vous faites de l’idéologie, faute d’être capable d’être efficace sur le terrain », a-t-elle accusé. Ce texte ouvre « une brèche », a dénoncé la députée PS Colette Capdevielle. « Après Mayotte, ce sera la Guyane, puis Saint-Martin, puis un beau jour, l’ensemble du territoire français », a abondé Aurélien Taché pour La France insoumise.

Le Monde avec AFP



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