La suppression de l’aide médicale de l’Etat, leitmotiv de la droite et pomme de discorde

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Le nouveau ministre de l’intérieur, Bruno Retailleau, au ministère, à Paris, lors de la passation de pouvoirs, le 23 septembre 2024.

Il est des symboles tenaces. Au chapitre immigration, l’aide médicale de l’Etat (AME) en est un. Ce dispositif clive l’arène politique et pourrait rapidement donner à voir les divisions au sein du nouveau gouvernement.

Tout juste nommé ministre de l’intérieur, poids lourd de l’exécutif et figure conservatrice des Républicains (LR), Bruno Retailleau a déclaré sur TF1, lundi 23 septembre, qu’il souhaitait s’attaquer à ce panier de soins pour les étrangers sans-papiers gagnant moins de 10 000 euros par an, et qui bénéficiait, fin 2023, à environ 450 000 personnes. « Je ne veux pas (…) que la France soit le pays le plus attractif d’Europe pour un certain nombre de prestations sociales, d’accès aux soins », a-t-il déclaré. Le nouveau locataire de la place Beauvau peut a priori bénéficier sur ce sujet d’une bienveillance du premier ministre, Michel Barnier, qui défendait en 2021, lors de sa campagne pour la primaire LR, la suppression de l’AME.

« Un dispositif de santé publique »

Des membres du gouvernement pourraient en revanche grincer des dents. La ministre de la transition écologique, de l’énergie, du climat et de la prévention des risques, Agnès Pannier-Runacher, plutôt rétive à la droitisation du macronisme, a réagi dès le lendemain sur France-Bleu Nord : « Nous avons été clairs. Une suppression ne serait pas acceptable parce que l’aide médicale d’État, au-delà [du fait qu’elle vient] en aide aux étrangers sur le territoire, est un dispositif de santé publique », a-t-elle opposé, en écho aux discussion qui ont traversé la macronie au moment des débats sur le projet de loi « immigration » porté par Gérald Darmanin, à l’automne 2023.

La ministre de la santé, Geneviève Darrieussecq, est, elle, restée silencieuse sur le sujet mais elle avait, en novembre 2023 et avec vingt-cinq autres députés Modem, signé un texte publié par le journal La Croix et intitulé « Aide médicale de l’État, oui à l’exception sanitaire française ! » Cette tribune s’opposait à la suppression de l’AME. A l’époque, la droite sénatoriale – majoritaire, Bruno Retailleau étant président du groupe des sénateurs LR – avait réussi à introduire la suppression de ce dispositif sanitaire, avant que l’article ne soit finalement retiré de la loi. Le gouvernement avait néanmoins promis de se pencher sur une réforme et, pour ce faire, une mission d’évaluation avait été confiée à l’ancien ministre socialiste de la santé, Claude Evin, et à l’ancien préfet et homme de droite Patrick Stefanini.

Ses conclusions, publiées le 4 décembre 2023, confirmaient « l’utilité sanitaire » de l’AME et mettaient en garde contre le « risque important de renoncement aux soins » que comporterait son remplacement par une aide médicale d’urgence, qui « aurait pour triple impact une dégradation de l’état de la santé des personnes concernées, des conséquences possibles sur la santé publique et une pression accentuée sur les établissements de santé ».

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