« La réorientation plus sociale de l’Europe va-t-elle survivre à la recomposition du Parlement européen après les élections du 9 juin ? »

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Dans cette campagne pour les élections européennes, les extrêmes droites et les gauches radicales font de l’Europe néolibérale une des sources des difficultés quotidiennes et des reculs sociaux dont souffrent les Français.

Du côté de Renaissance et de ses alliés, comme de celui des Républicains, les « réformes » et la marginalisation des partenaires sociaux sont revendiquées comme une modernisation de la France pour l’aligner sur ce qui serait une normalité continentale. Si les positions politiques divergent, le portrait de l’Union européenne (UE) que dressent la plupart des partis est ainsi paradoxalement convergent.

Pourtant, le 11 mars, à Bruxelles, le gouvernement belge est à la fête. Mousseux également à la Commission. Sentiment de victoire à la Confédération européenne des syndicats. Et ce n’est pas parce qu’une grève massive des transports publics belges est prévue le lendemain – il n’y a pas qu’en France…

La case des « idéologues »

En réalité, le Conseil européen vient de valider, sous la présidence de la Belgique, la proposition de directive sur les travailleurs des plates-formes, dernier verrou avant son adoption. Après transposition dans les droits nationaux, ces travailleurs bénéficieront d’une présomption réfutable de salariat, l’espoir d’une avancée sociale majeure dans l’économie dite « collaborative ». Le perdant est le gouvernement français, dont la position est qualifiée d’« idéologique » à Bruxelles.

Le matin même, la France avait pourtant encore les cartes en main pour faire capoter le projet. Elle bénéficiait de l’abstention (équivalente à un refus) de l’Allemagne : au sein de la coalition, à Berlin, sociaux-démocrates et Verts n’avaient pu convaincre les libéraux. Deux pays complétaient cette minorité de blocage : l’Estonie et la Grèce. Mais, patatras !, refusant d’être enfermés à leur tour dans la case des « idéologues », ils ont rejoint la majorité durant l’après-midi.

Cette directive n’est qu’une étape supplémentaire d’une réorientation de la stratégie de l’UE. La précédente, héritée de la crise de 2008 – dogme budgétaire, concurrence entre Etats membres poussant au dumping social –, a été suspendue durant la crise due au Covid-19 et s’est fracassée sur le constat d’un déclin productif en comparaison des Etats-Unis. Depuis la fin de la présidence française du Conseil de l’UE, en juin 2022, les mots-clés sont désormais « coordination des politiques salariales », « investissement social » et « dialogue social ».

Convergence sociale par le haut

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