« La question n’est pas de savoir si l’Occident est trop mou pour se battre, mais sous quelles conditions il le ferait »

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L’Occident est-il trop mou pour se battre ? Cette question, naguère cantonnée aux tribunes populistes, façonne désormais en silence la politique de défense d’une grande partie de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN). Des présupposés tenaces sur nos sociétés – trop gâtées, trop individualistes, trop « post-héroïques » –, ainsi que des sondages récents, révèlent une faible disposition au combat parmi les populations de l’OTAN (16 % des Italiens, 17 % des Allemands, 35 % des Britanniques seulement se déclarent prêts à se battre). Ces éléments impactent aujourd’hui les stratégies de mobilisation, les priorités de recrutement et même l’allocation des ressources de défense. Ce pessimisme stratégique à l’égard de nos populations semble plausible, mais il risque de devenir dangereusement autoréalisateur.

La volonté de se battre n’est ni prévisible ni immuable : elle constitue plutôt un potentiel social, une disposition qu’il convient de cultiver ou d’affaiblir, à l’instar d’autres domaines de l’action publique. Que ce soit en matière d’éducation, de finance ou de santé, les politiques publiques opèrent à partir d’hypothèses sur le comportement citoyen. Ces postulats ne fondent pas seulement les mesures adoptées, mais en déterminent largement les résultats.

Il en va de même pour la défense. Si les planificateurs militaires présupposent l’inertie sociale et conçoivent leurs dispositifs sur cette base, ils accroissent la probabilité de ce scénario. Bref, une forme de pensée magique à l’échelle géostratégique.

Potentiel combattant

Les systèmes de mobilisation otaniens succombent malheureusement à ce piège. Au lieu de viser une levée en masse motivée, ils poursuivent d’autres objectifs politiques : renforcement de la discipline, conduite de guerres culturelles, ou apaisement des élites dirigeantes. Cette dérive s’explique par la distance croissante entre société civile et élites militaro-politiques, qui résulte en partie de la professionnalisation des dernières décennies.

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