La visite en grande pompe du président chinois, Xi Jinping, à Paris souligne la centralité croissante de la Chine dans l’économie mondiale, fruit d’une politique planifiée et construite sur le long terme. Cette centralité est vouée à perdurer grâce à une politique industrielle qui anticipe les besoins de demain, notamment ceux liés à la décarbonation de nos économies.
Alors que la Chine raffine deux tiers du lithium mondial – composant principal des batteries lithium-ion – et fabrique 80 % de ces batteries, la dépendance de l’Europe envers la Chine pour son approvisionnement en matériaux critiques, indispensables à la transition vers une économie verte, est un acte délibéré.
Une chute brutale des prix
En ce sens, la position hégémonique de la Chine dans les chaînes d’approvisionnement mondiales des matériaux critiques relève d’une stratégie de domination économique issue directement de la pensée politique du président Xi. Pékin a d’ailleurs récemment joué la carte stratégique en manipulant les cours du lithium.
En accumulant des stocks pour ses entreprises de batteries, les entreprises d’Etat chinoises ont contribué à faire monter les prix, poussant ainsi le reste du monde à augmenter ses capacités d’extraction. Profitant d’une stagnation conjoncturelle de la vente des véhicules électriques sur le marché national, la Chine a relâché soudainement les stocks, entraînant une chute brutale des prix et faisant perdre leur rentabilité aux nouveaux projets miniers que les acteurs chinois ont pu acquérir à bas coûts.
Ce type de stratégie coordonnée, qui vise des intérêts géoéconomiques sur le temps long, est répliqué par Pékin pour d’autres matériaux critiques comme le nickel. Cette tactique révèle l’ambition chinoise : utiliser ses ressources comme une arme économique et géopolitique pour rester incontournable dans le secteur des technologies de décarbonation futures.
L’Europe se trouve ainsi face à un dilemme crucial : concilier décarbonation et maintenir une activité industrielle. Les stratégies industrielles chinoises liées à la décarbonation montrent clairement que l’Europe ne peut se permettre de rester passive. Non pas par défiance primaire envers la Chine, mais simplement si nous voulons éviter d’être les simples clients de notre propre décarbonation.
L’Europe doit réagir
Le vote récent du Parlement européen en faveur du règlement pour une industrie « zéro net » (The Net-Zero Industry Act) et le Critical Raw Materials Act vont certes dans la bonne direction, mais ne suffiront pas à garantir notre capacité à produire des technologies vertes en Europe.
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