
Avant même l’ouverture du débat parlementaire organisé lundi 3 mars à l’Assemblée nationale sur la situation en Ukraine, les déclarations de Marine Le Pen, deux jours plus tôt, en marge du Salon de l’agriculture, avaient levé toute espèce d’ambiguïté. Il n’y aura pas d’unité nationale pour accompagner l’entrée de la France dans le nouvel ordre mondial, cette situation éminemment dangereuse créée par le désengagement vis-à-vis de l’Europe que revendique et pratique avec une brutalité assumée la nouvelle administration américaine.
A rebours de la plupart des responsables politiques indignés par le comportement de Donald Trump et du vice-président américain, J. D. Vance, qui n’ont pas seulement lâché Volodymyr Zelensky mais ont tenu à l’humilier devant les caméras du monde entier, vendredi 28 février, Marine Le Pen a banalisé la séquence n’y voyant qu’un échange « passionné » entre « deux présidents de nations ». Et de ce fiasco médiatisé elle a espéré que naisse « une première étape vers la paix » en fustigeant le prétendu camp des va-t-en-guerre. Trump et Poutine apprécieront.
Depuis trois ans, la guerre qui se déroule sur le sol européen, à moins de 2 000 kilomètres de Paris, imprègne la politique française. Le conflit a dominé la campagne présidentielle de 2022. Il a facilité la réélection d’Emmanuel Macron face à des adversaires bien moins aguerris sans pour autant lui donner quitus sur le contenu de la politique nationale qu’il entendait mener.
Menace existentielle
La réforme des retraites, ce passage aux 65 ans qu’il avait proposé à peine réélu, dans le cadre d’un pacte productif censé muscler l’offre française, a été vivement rejetée. C’est en poussant son avantage sur les séquelles du mouvement social que le Rassemblement national est sorti gagnant deux ans plus tard de la campagne des élections européennes de juin 2024. Ni les avertissements réitérés d’Emmanuel Macron à propos d’une Europe en « danger de mort » ni sa tentative de focaliser le débat autour d’un éventuel envoi de troupes sur le sol ukrainien ne sont parvenus à lui faire reprendre l’avantage. De cet échec découle la malencontreuse dissolution de l’Assemblée nationale, l’instabilité gouvernementale qui en est résultée et l’arrêt en France de toute réforme d’envergure.
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