Deux jours après la proclamation de la victoire de Nicolas Maduro, la pression internationale pour que les résultats détaillés de l’élection présidentielle au Venezuela soient publiés s’accentue. Mercredi 31 juillet, l’Union européenne, les pays du G7 (Canada, France, Allemagne, Italie, Japon, Royaume-Uni, Etats-Unis), ou encore les présidents brésilien Luiz Inacio Lula da Silva et américain Joe Biden, ont lancé des appels en ce sens.
« Notre patience, et celle de la communauté internationale, arrive à bout », a résumé le porte-parole du Conseil national de sécurité de la Maison Blanche, John Kirby, mercredi. Il a réclamé que les « autorités électorales vénézuéliennes » publient « les résultats entiers et détaillés de cette élection, pour que tout le monde puisse voir les résultats ».
M. Maduro a assuré mercredi qu’il était « prêt à présenter 100% des pièces » des élections de dimanche. Le chef d’Etat sortant, 61 ans, a été officiellement proclamé président lundi après l’annonce de résultats par le Conseil national électoral (CNE). Sans en fournir le détail, le CNE a affirmé qu’il a obtenu 5,15 millions de voix (51,2 %), devant Edmundo Gonzalez Urrutia, qui en aurait recueilli 4,5 millions (44,2 %). Mais la cheffe de l’opposition Maria Corina Machado assure que son camp dispose des « preuves de la victoire » grâce à la compilation de procès-verbaux. Selon elle, M. Gonzalez Urrutia a obtenu environ 70 % des voix.
M. Maduro a le soutien de la Chine et de la Russie, mais apparaît de plus en plus isolé. L’Organisation des Etats américains a dénoncé « une manipulation aberrante ». Neuf pays d’Amérique latine (Argentine, Costa Rica, Equateur, Guatemala, Panama, Paraguay, Pérou, République dominicaine, Uruguay) ont appelé à un « réexamen complet avec la présence d’observateurs électoraux indépendants ». En représailles, Caracas a retiré son personnel diplomatique de sept pays latino-américains et rompu ses relations avec le Pérou, qui a reconnu le candidat d’opposition comme président « légitime ». Le Costa Rica a offert l’asile politique à ce dernier, comme à l’opposante en chef. Le Panama va pour sa part suspendre ses vols à destination du Venezuela, en réponse à une mesure similaire prise par Caracas.
Dans les manifestations, 16 morts, selon la cheffe de l’opposition
Des milliers de partisans de l’opposition sont descendus mardi dans les rues pour revendiquer la victoire de leur candidat. Aux cris de « Liberté, liberté ! », des sympathisants d’Edmundo Gonzalez Urrutia et de Maria Corina Machado se sont rassemblés à Caracas et dans d’autres villes du pays. M. Gonzalez Urrutia, 74 ans, qui a remplacé comme candidat Mme Machado, déclarée inéligible, a interpellé les forces armées. « Il n’y a aucune raison de réprimer le peuple du Venezuela », a-t-il lancé devant ses sympathisants dans la capitale.
Mercredi, la cheffe de l’opposition a annoncé un bilan de seize morts lors des manifestations. « J’alerte le monde sur l’escalade cruelle et répressive du régime, qui compte à ce jour plus de 177 détentions arbitraires, 11 disparitions forcées et au moins 16 meurtres au cours des dernières 48 heures », a écrit Mme Machado sur X.
« C’est la réponse criminelle de Maduro au peuple vénézuélien qui est descendu dans la rue en famille, en tant que communauté, pour défendre sa décision souveraine d’être libre. Ces crimes ne resteront pas impunis », a-t-elle ajouté.
L’Enquête nationale sur les hôpitaux, une ONG, a dénombré 84 blessés civils, tandis que le ministère de la défense a enregistré 23 militaires blessés. Le parquet a déclaré que « 749 délinquants » avaient été arrêtés dans le cadre des manifestations, certains pour terrorisme. L’opposition dénonce une « escalade de la répression » et a annoncé l’arrestation d’un de ses cadres, Freddy Superlano.
Répression « inacceptable » pour Washington
Nicolas Maduro a accusé l’opposition d’être « responsable de la violence criminelle », lors d’une réunion des plus hautes instances dirigeantes du pays. « La justice passera contre les diables et les démons », a-t-il averti devant plusieurs centaines de personnes, qui ont marché jusqu’au palais présidentiel pour lui apporter leur soutien.
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Washington a jugé « inacceptable » la répression et le haut-commissaire des Nations unies aux droits de l’homme, Volker Türk, s’est dit « extrêmement inquiet » « Les autorités du Venezuela doivent mettre fin aux détentions, à la répression et à la rhétorique violente contre les membres de l’opposition », a écrit de son côté le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell sur X.
Pilier du pouvoir sous le président Hugo Chavez (mort en 2013) comme sous son dauphin Nicolas Maduro, l’appareil sécuritaire tient entre ses mains une part du destin du pays. Le ministre de la défense, le général Vladimir Padrino Lopez, a « réaffirmé » la « loyauté absolue » des forces armées au président Maduro.
Cette nouvelle flambée de tensions survient alors que le Venezuela, longtemps un des pays les plus riches d’Amérique latine, est empêtré dans une crise sans précédent : effondrement de la production pétrolière, PIB réduit de 80 % en dix ans, pauvreté et systèmes de santé et éducatif totalement délabrés. Sept millions de Vénézuéliens ont fui le pays.
Venezuela : pourquoi la victoire de Nicolas Maduro est-elle contestée ? Comprendre en trois minutes
Dessin animé à son effigie, produits dérivés, bains de foule… Nicolas Maduro avait mis toutes les chances de son côté pour être réélu pour un troisième mandat à la tête du Venezuela. Et il a obtenu le résultat escompté dimanche 28 juillet, en dépit des sondages qui le donnaient perdant.
Quelques jours après les résultats du scrutin, lundi 29 juillet, difficile d’y voir clair. Si la victoire du président sortant a été officiellement annoncée par le Conseil national électoral, neuf pays d’Amérique latine réclament un « réexamen complet des résultats ». L’opposition refuse de reconnaître les résultats officiels, qui annoncent 51,20 % des suffrages en faveur de Nicolas Maduro. Selon elle, c’est son candidat, Edmundo Gonzalez Urrutia, qui aurait remporté l’élection, avec plus de 70 % des voix.
Dans cette vidéo, nous faisons le point sur le contexte politique de cette élection contestée et sur les critiques émises, à l’intérieur comme à l’extérieur du pays, à l’encontre de l’héritier chaviste.
Pour en savoir plus sur la crise économique qui secoue le pays depuis le milieu des années 2010, nous vous recommandons le décryptage ci-dessous.
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