Inquiète d’une défaite de la junte birmane face aux multiples guérillas qui font vaciller le pouvoir de la dictature militaire, la Chine a récemment proposé aux généraux la création d’une société commune de sécurité pour protéger ses intérêts dans ce pays. Un média officiel birman a confirmé le 4 décembre que la junte avait récemment mis en place un comité interministériel pour étudier les modalités de l’accord avec la Chine – notamment le statut du personnel chinois, dont on ne sait à ce stade s’il sera civil ou militaire, et la question du port d’armes.
Cette décision serait en tous les cas d’importance non négligeable : pour la première fois, des membres des forces de sécurité chinoises, en uniforme ou non, fouleraient le sol birman dans des zones de conflits.
Le temps presse : la zone côtière de Kyaukphyu, dans le golfe du Bengale, d’où partent vers la Chine un oléoduc et gazoduc chinois, est encerclée depuis quelques semaines par l’Armée de l’Arakan, le puissant groupe armé autonomiste de l’Etat Rakhine. Kyaukphyu dispose certes d’un aéroport et abrite plusieurs garnisons de l’armée birmane, mais l’étau se resserre. Or, cette ville doit accueillir un port en eau profonde et une zone économique spéciale détenus à 70 % par le grand groupe d’investissement d’Etat chinois CITIC, offrant à la République populaire un accès à l’océan Indien. Ce projet au long cours, mis en pause en raison de la pandémie puis du coup d’Etat de février 2021, a été réactivé par la junte en décembre 2023. Des travailleurs chinois sont arrivés en mai, mais ils ont été évacués en novembre en raison de l’instabilité locale croissante. Kyaukphyu a été identifié comme une zone à protéger en priorité, possiblement avec le renfort d’une société de sécurité chinoise privée.
Pressions sur les groupes ethniques armés
Depuis cet été, la Chine soutient plus activement la junte, dont le chef, le général Min Aung Hlaing, a pour la première fois été convié en Chine pour une tournée début novembre. Il y a été reçu par le premier ministre chinois Li Qiang. Une aide d’un milliard de yuans (130 millions d’euros) a aussi été accordée au gouvernement militaire birman selon le site Myanmar Now.
En même temps, Pékin exige la fin des combats à ses frontières. Pour ce faire, elle multiplie les pressions sur les groupes ethniques armés du nord de l’Etat Shan, qui bataillent à la frontière chinoise : la Chine ne s’attendait pas à ce que leurs offensives répétées contre le régime, commencées il y a un an, aillent si loin – en l’occurrence, jusqu’à la grande ville de Lashio, tombée début août. Elle exige la fin des combats à ses frontières.
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