Israël s’enferme dans son jusqu’au-boutisme

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En essayant, le 9 septembre, manifestement sans succès, d’assassiner à Doha la direction politique en exil du Hamas, alors qu’elle examinait une proposition de cessez-le-feu américaine, le gouvernement israélien a confirmé que parvenir à un arrêt des combats à Gaza et à la libération des otages retenus dans l’étroite bande de terre n’est pas sa priorité.

L’élimination, le 31 juillet 2024, à Téhéran, du chef politique du Hamas, Ismaël Haniyeh, avait déjà signalé qu’aucun dirigeant islamiste n’était en sécurité du fait de l’écrasante supériorité de l’armée israélienne et de son renseignement. Mais la riposte, au Qatar, même si la coalition au pouvoir a tenté de la justifier comme une réponse à une attaque terroriste survenue à Jérusalem, la veille, entraîne la fin de la diplomatie, et pour longtemps.

Après les massacres du 7 octobre 2023 perpétrés par le Hamas, la négociation a pourtant prouvé sa supériorité sur la bombe et sur une guerre dévastatrice qui entrera bientôt dans sa troisième année. Enfermée dans son jusqu’au-boutisme, qui lui vaut un isolement international croissant dont elle n’a cure, la coalition israélienne semble incapable d’accepter le moindre compromis, quel qu’en soit le prix pour les Israéliens prisonniers à Gaza.

Il ne s’agit pas du seul enseignement de l’attaque survenue au Qatar, dont Benyamin Nétanhayou affectionnait le rôle d’intermédiaire lorsqu’il permettait des transferts d’argent au bénéfice du Hamas à Gaza. Ce calcul cynique pour entretenir les fractures palestiniennes a débouché sur les massacres du 7 octobre 2023. Le premier ministre israélien n’a jamais eu à en répondre.

Consentement des Etats-Unis

En utilisant la dernière proposition en date formulée par les Etats-Unis comme un appât, Benyamin Nétanyahou a une nouvelle fois manipulé l’administration de Donald Trump sans que cette dernière ne lui en tienne rigueur. La réaction de la Maison Blanche, qui a considéré que ce nouveau bombardement israélien d’un pays théoriquement souverain visité par le président des Etats-Unis au printemps « ne promeut pas les objectifs d’Israël ni de l’Amérique », n’a en effet rien d’un désaveu cinglant. La campagne de bombardements de l’Iran, en juin, alors que des négociations devaient se tenir entre Iraniens et Américains à propos du programme nucléaire de Téhéran, avait déjà montré qu’au Moyen-Orient Benyamin Nétanyahou décide et Donald Trump suit.

Ce consentement des Etats-Unis est d’autant plus inquiétant que la force, utilisée sans limites et au mépris du droit international, est devenue le seul langage pratiqué par l’Etat hébreu qui, outre le Yémen, bombarde quasi quotidiennement le Liban, en dépit des termes d’un cessez-le-feu qu’il a lui-même acceptés, et la Syrie, pourtant aux prises avec une délicate transition.

L’assentiment américain n’est pas le seul en cause. Parmi les pays qui ont unanimement condamné, le 9 septembre, le comportement d’Etat voyou adopté par Israël, qui osera en tirer les conséquences en matière politique et diplomatique ? Tous savent pourtant ce qu’il signifie pour la bande de Gaza. Sa décimation et sa destruction ne pourront que franchir un nouveau palier si l’offensive israélienne contre la ville éponyme, claironnée depuis des semaines par Benyamin Nétanyahou, va jusqu’à son terme. Sans apporter pour autant le moindre élément de réponse à la question lancinante du « jour d’après ».

Le Monde



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