« Il insulte et détruit la mémoire des morts »

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Les arbres plantés il y a moins d’un an au bout de la rue Iablounska, à Boutcha, sont encore chétifs. Chacun porte le nom d’une victime ukrainienne tuée sous l’occupation russe, du 3 au 31 mars 2022. A la libération, la découverte de l’ampleur des massacres a fait de la ville un symbole des atrocités commises par la Russie en Ukraine. Dans la rue Iablounska, 20 cadavres de civils avaient été retrouvés le long du bitume, dont l’un avec les mains attachées. Le Kremlin a toujours nié les crimes de guerre perpétrés à Boutcha et soutient qu’il s’agissait d’une mise en scène orchestrée par Kiev.

Trois ans après, le président américain, Donald Trump, négocie directement avec Moscou pour imposer un cessez-le-feu, qualifie Volodymyr Zelensky de « dictateur », suspend l’aide militaire et le partage de renseignements avec Kiev, refuse de qualifier la Russie d’agresseur et reprend la propagande du Kremlin en accusant l’Ukraine d’avoir commencé la guerre. A Boutcha, encore hantée par les massacres commis par les Russes, les propos du chef de la Maison Blanche ont semé la sidération et une immense colère. « Trump ferme les yeux sur le fait que Poutine a envahi l’Ukraine, tué des milliers et des milliers d’Ukrainiens, et veuille prendre encore plus de territoire », s’indigne Veronika. A 14 ans, la jeune fille, originaire du Donbass, n’a quasiment connu que la guerre.

Des employés municipaux travaillent là où a été découverte une fosse commune après l’occupation russe, devant le monument en hommage aux victimes de l’occupation, à Boutcha, en Ukraine, le 8 mars 2025.
Viktor Shatylo, 63 ans, habitant de la rue Iablounska, devant la porte de son garage touché par des éclats d’obus pendant l’occupation russe. A Boutcha, en Ukraine, le 8 mars 2025.

Les habitants de la ville martyre redoutent désormais que le rapprochement des Etats-Unis avec Moscou renforce l’impunité du Kremlin. « On est sous le choc, parce qu’on avait de l’espoir », confie Viktor Shatylo, 63 ans, dénonçant la « trahison » de Washington. Les contre-vérités de Donald Trump, qui reprend la propagande russe, le troublent particulièrement. « Comment peut-on dire que blanc, c’est noir, et noir, c’est blanc ? Trump devrait aller voir un psychiatre, parce que tout le monde sait bien qui a agressé qui ! » En accusant l’Ukraine d’avoir déclenché la guerre, le président américain ne fait pas que falsifier l’histoire : « Il insulte et détruit la mémoire des morts », affirme le retraité. Il est d’autant plus choqué qu’il a été un témoin privilégié des massacres perpétrés à Boutcha par la Russie, restés impunis.

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