Une équipe de l’université d’Oxford (Royaume-Uni) associée à l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL, Suisse) vient d’inventer un nouveau domaine technologique, la « gouttélectronique » ou l’art de manipuler les courants électriques à l’aide de minuscules gouttes gélifiées. Comme les matériaux semi-conducteurs de la microélectronique, ces composés sont « dopés » avec différentes charges électriques. Ici, point d’électrons, mais des ions sodium ou chlore qui circulent. L’association de gouttes positives et négatives sert à créer des diodes, des transistors, des portes logiques utilisées pour faire des calculs…, comme présenté dans Science, le 29 novembre. Précédemment l’équipe a créé une source de courant et une batterie. La petite taille (une centaine de micromètres), la biocompatibilité et la sensibilité permettent de créer des capteurs pour des tissus biologiques ou des cellules.
« Beaucoup de dispositifs précédents, basés sur la “iontronique”, la circulation d’ions, s’appuient sur des systèmes à micro ou nanofluidique avec des liquides conducteurs confinés dans des petits canaux, constate Yujia Zhang, de l’EPFL. Notre approche est différente, assurant la petite taille mais aussi de nouvelles fonctions. Nos systèmes sont modulaires, reconfigurables et adaptés à des mesures en biologie. » Son équipe n’a pas inventé le terme « iontronique », mais a conçu celui de « dropletronic », en anglais, qu’on peut traduire par « gouttélecrtronique ». Le chercheur explique aussi que l’électronique classique n’est pas très adaptée aux mesures sur les cellules car elle demande des interfaces de plus grande taille ainsi que des courants plus élevés.
Des brevets protègent la fabrication de ces gouttes faites d’un réseau de polymère à base de fils de soie qui peuvent être chargés négativement et positivement. Les gouttes emprisonnent aussi des sels chargés et mobiles qui font circuler les courants. Un éclairage aux ultraviolets permet d’« ouvrir » l’interface entre deux gouttes accolées afin que ce courant passe entre les perles.
L’équipe reconnaît que ces travaux sont des prototypes et que la dropletronic est encore au stade de l’enfance, mais voit un avenir prometteur pour des interfaces avec la matière vivante.