En Suisse, l’achat des F-35 vire à l’affaire d’Etat

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Si l’affaire n’était pas aussi sérieuse, elle prêterait à sourire. D’un côté, le gouvernement suisse laisse entendre ces derniers jours qu’on l’aurait mené en bateau outre-Atlantique, et qu’un « prix fixe » avait bel et bien été figé dans le contrat paraphé le 19 septembre 2022 pour l’achat de trente-six chasseurs F-35. Considérés comme excessivement performants en regard de la seule mission de police du ciel qui leur sera confiée dans le pays alpin et neutre, ces appareils seront livrés progressivement à l’armée de l’air helvétique entre 2027 et 2030, alors qu’ils équipent déjà d’autres forces aériennes européennes membres de l’OTAN.

Un prix fixe, vraiment ? A Washington, l’administration Trump, jusqu’ici laconique sur le sujet, évoque un « malentendu ». Mais mercredi 25 juin, à Berne, le ministre suisse de la défense, Martin Pfister, a été contraint d’admettre, après des mois de rumeurs, que l’acquisition des appareils américains pourrait coûter plus de 1 milliard de francs suisses (soit environ 1,07 milliard d’euros) supplémentaires au contribuable, manière de reconnaître que le prix fixe ne l’a jamais vraiment été que dans la tête de ceux qui voulaient à tout prix imposer cet appareil. En réalité, estiment certains observateurs, le montant du dépassement pourrait même doubler.

Il n’en fallait pas plus pour relancer de manière spectaculaire un dossier sensible qui n’a jamais cessé de faire des vagues depuis que Berne a opté pour l’appareil du constructeur Lockheed Martin plutôt que pour le Rafale de Dassault – pourtant préféré par les pilotes de l’armée de l’air helvétique lors des essais en vol.

Dès le départ, l’ex-ministre de la défense Viola Amherd – qui a démissionné à la surprise générale, en mars, après une série de crises au sein de l’armée – répétait que le F-35 offrait le meilleur rapport qualité‑prix et assurait que la Suisse avait négocié et obtenu des conditions forfaitaires, juridiquement contraignantes. Une affirmation d’autant plus étrange que, dans le secteur de l’armement, les surcoûts à la production sont généralement facturés au client. « Nous achetons à prix fixe. Cela a également été confirmé publiquement par les Etats‑Unis, par l’ambassadeur américain », déclarait-elle devant le Parlement, en septembre 2023.

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