Le premier ministre géorgien, Irakli Kobakhidze, a exclu, dimanche 1er décembre, l’organisation de nouvelles élections législatives, malgré la crise politique et trois nuits consécutives de manifestations proeuropéennes dispersées par la force. « Bien sûr que non », a-t-il répondu à la presse, interrogé sur cette hypothèse.
L’ex-république soviétique est dans la tourmente depuis le scrutin du 26 octobre remporté par le parti au pouvoir, Rêve géorgien, mais contestées par l’opposition, qui accuse le gouvernement de dérive autoritaire prorusse.
Des milliers de manifestants sont descendus dans les rues de Tbilissi et d’autres villes du pays, ces trois dernières nuits, pour protester contre le report à 2028 des négociations d’adhésion à l’Union européenne, annoncé jeudi par le gouvernement.
Les forces de l’ordre, qui ont procédé à plus de 150 interpellations, les ont dispersés à l’aide de canons à eau et de gaz lacrymogène. Plusieurs dizaines de policiers ont été blessés par des projectiles et des pétards. La Géorgie a obtenu le statut de candidat à l’adhésion en décembre 2023, mais Bruxelles a, depuis, gelé le processus, accusant le gouvernement de graves atteintes aux principes démocratiques. Ce dernier accuse de son côté Bruxelles de « chantage », mais assure toujours vouloir adhérer à l’UE à l’horizon 2030.
Kaja Kallas, haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, a jugé « inacceptable », dimanche, la dispersion par la force des manifestations proeuropéennes. « Il est clair que le recours à la violence contre des manifestants pacifiques n’est pas acceptable et que le gouvernement géorgien doit respecter la volonté du peuple géorgien », a affirmé Mme Kallas lors d’une visite à Kiev, en Ukraine, au premier jour de son mandat. La situation aura « clairement des conséquences » sur les relations entre Tbilissi et Bruxelles, a-t-elle averti.
Des « options » ont, selon elle, été proposées aux 27 Etats membres de l’UE quant à la manière de réagir, y compris par des sanctions. « Mais, bien sûr, nous devons parvenir à un accord », a ajouté la diplomate estonienne.
« La seule institution légitime du pays »
Dans une allocution prononcée samedi, la présidente proeuropéenne, Salomé Zourabichvili, dont les fonctions sont essentiellement honorifiques, a déclaré que le Parlement n’avait aucune légitimité pour désigner son successeur et a promis de rester à son poste à l’issue de son mandat, qui se termine cette année. Elle juge que les législatives remportées avec près de 54 % des voix par Rêve géorgien, le parti emmené par l’homme d’affaires Bidzina Ivanichvili, ont été entachées de fraudes.
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« Tant qu’il n’y aura pas de nouvelles élections et un Parlement qui élira un nouveau président selon de nouvelles règles, mon mandat se poursuivra », a déclaré Salomé Zourabichvili, dans un entretien exclusif accordé à l’Agence France-Presse (AFP). « Personne en dehors de la Géorgie, parmi nos partenaires démocratiques, n’a reconnu les élections », souligne la présidente qui se présente comme la « seule institution légitime du pays ».
Le Parlement nouvellement élu a, lui, annoncé qu’il élirait le prochain président le 14 décembre et que son investiture pour un mandat de cinq ans aurait lieu le 29 décembre.
Après les législatives, un groupe d’observateurs géorgiens a déclaré avoir des preuves de fraudes électorales à grande échelle. L’UE a exigé une enquête sur ce qu’elle a qualifié de « graves » irrégularités. Le porte-parole du département d’Etat américain, Matthew Miller, a, lui aussi, « condamné l’usage excessif de la force contre les Géorgiens exerçant leur liberté de manifester ». « Nous avons suspendu notre partenariat stratégique avec la Géorgie », a-t-il ajouté. La France, le Royaume-Uni, l’Ukraine, la Pologne, la Suède et la Lituanie ont aussi exprimé leurs inquiétudes.