Le discours de plus en plus ferme du gouvernement, la dispersion par la force de précédents rassemblements et l’arrestation de plusieurs chefs de l’opposition n’ont jusqu’à présent pas entamé la détermination des manifestants proeuropéens géorgiens. Ils étaient de nouveaux plusieurs milliers, jeudi 5 décembre au soir, près du Parlement à Tbilissi, sous le regard de la police antiémeute, ont constaté des journalistes de l’Agence France-Presse.
La participation au début du rassemblement était toutefois plus faible que lors des sept soirs précédents. Des manifestants ont tapé sur les barrières métalliques qui bloquent l’entrée du Parlement, ont brandi des drapeaux de l’Union européenne (UE) et ont fait retentir des klaxons.
Confronté à cette protestation, le gouvernement, accusé de dérive autocratique prorusse par ses détracteurs, a encore musclé son discours, jeudi. « Nous ferons tout le nécessaire pour éradiquer complètement le libéralo-fascisme » de l’opposition, a déclaré lors d’une conférence de presse le premier ministre, Irakli Kobakhidze, en accusant de nouveau – sans fournir de preuves – la contestation de fomenter une révolution et d’être financée depuis l’étranger. Il s’en est également pris au chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken, qui a condamné mercredi la « violence injustifiée » du pouvoir.
Mercredi, les autorités ont perquisitionné les bureaux du parti d’opposition Droa. Des policiers cagoulés y ont brutalisé puis embarqué Nika Gvaramia, le dirigeant d’un autre parti allié, Akhali, selon des images de la chaîne de télévision indépendante Pirveli. Selon cette chaîne, deux autres dirigeants de l’opposition, Alexandre Elissachvili et Zourab Datounachvili, ont été arrêtés. Le ministère de l’intérieur a aussi rapporté l’arrestation de sept personnes accusées d’avoir « organisé » des violences lors des manifestations. Elles encourent jusqu’à neuf ans de prison.
La Géorgie traverse une grave crise politique depuis les législatives du 26 octobre, remportées par le parti au pouvoir, Rêve géorgien, mais dénoncées comme truquées par ses opposants. Des manifestations ont éclaté le 28 novembre après l’annonce par M. Kobakhidze de la suspension jusqu’en 2028 des ambitions de cette ex-république soviétique d’intégrer l’UE.
Canons à eau et gaz lacrymogène
Six des sept précédentes nuits de manifestations à Tbilissi ont été dispersées à coups de canon à eau et de gaz lacrymogène, tandis que des protestataires tiraient des feux d’artifice sur les policiers et tentaient de les aveugler avec des lasers. Près de 300 personnes ont été interpellées et 143 policiers ont été blessés depuis le début du mouvement, selon le ministère de l’intérieur.
Le principal parti d’opposition géorgien, le Mouvement national uni (MNU) de l’ex-président emprisonné Mikheïl Saakachvili, a dénoncé « une campagne de terreur et de répression ». Le premier ministre, Irakli Kobakhidze, a assuré que les Géorgiens l’avaient « mal compris » et que l’intégration européenne « progressait », en dépit du report qu’il a lui-même annoncé.
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Le commissaire géorgien aux droits humains, Levan Ioseliani, a pour sa part accusé la police de violenter les manifestants « de façon punitive ». Des hauts fonctionnaires géorgiens ont commencé en outre à exprimer leur opposition au gouvernement en claquant la porte.
De son côté, le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a annoncé jeudi dans la matinée des sanctions contre dix-neuf responsables géorgiens, dont M. Kobakhidze et le milliardaire Bidzina Ivanichvili, homme fort du pays, suspecté de tirer les ficelles de la politique nationale.