Déforestation, contamination des sols, pollution des eaux… Le coût environnemental de la cocaïne en Colombie est élevé, même s’il est difficile à établir avec précision. « En matière d’économies illégales, le manque de données complique le travail des chercheurs et des pouvoirs publics », souligne Luis Felipe Cruz, chercheur à la fondation Dejusticia.
Selon un rapport du Bureau local de l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (UNODC), publié vendredi 18 octobre, les cultures de coca dans le pays ont progressé en 2023 de 10 %, pour atteindre 253 000 hectares, et la production de cocaïne de 53 %, pour atteindre 2 664 tonnes – un record historique. « La culture de la coca et la production de cocaïne continuent d’être une menace pour la conservation de l’environnement, de la biodiversité biologique et culturelle », souligne le rapport, alors que s’ouvre, lundi 21 octobre, à Cali, la COP16 sur la biodiversité.
Même si elles sont beaucoup moins voraces que l’élevage, les cultures de coca ont indiscutablement contribué à la déforestation de l’Amazonie. « Dans les régions retirées où il y a eu un boum de la coca, l’économie locale s’est transformée et la déforestation a indirectement augmenté », relève l’économiste Lucas Marin.
Cet appauvrissement des sols entraîne une perte de biodiversité. Une perte d’autant plus dommageable que la coca est cultivée dans des écosystèmes fragiles : 14 % dans les réserves forestières et 4 % dans les parcs nationaux, selon le rapport de l’UNODC qui précise que 10 % des cultures sont localisées dans des réserves indigènes et 20 % sur les terres des communautés noires.
Pollution au manganèse
Dans le sud-ouest du pays, les champs de coca sont gorgés de pesticides. « Mais c’est le cas de toutes les monocultures, souligne toutefois l’ingénieur agronome Luis Alejandro Paez. De ce point de vue, la coca n’est pas pire que la banane ou le café. »
Après la culture, le processus de transformation de la feuille de coca est également source de pollution. Celle-ci démarre in situ dans des « laboratoires » qui ne sont jamais que des bâches en plastique tenues par quatre poteaux. Les feuilles de coca coupées menu sont mises à macérer dans un mélange d’essence et de ciment que les « cocaleros » jettent ensuite dans la terre ou la rivière.
La « pâte base » obtenue part dans une « cuisine » clandestine loin dans la forêt pour devenir de la poudre blanche. Permanganate de potassium, acide sulfurique, acétone, éther et autres produits chimiques sont alors utilisés pour extraire le chlorhydrate de cocaïne. Les résidus partent tous dans les sols et les eaux. De l’avis des spécialistes, le plus inquiétant est le permanganate de sodium qui contient du manganèse, un métal lourd quasiment impossible à extraire des eaux et des sols.
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