La Californie, qui penche à gauche depuis de vingt ans, n’a pas le statut de « swing state », comme on appelle les Etats où l’écart entre les deux candidats a été inférieur à 3 points en 2020. Mais du fait de la candidature de Kamala Harris, qui a fait toute sa carrière politique en Californie, l’Etat est devenu le repoussoir suprême de Donald Trump, l’obsession des clips de campagne des républicains.
Dans chacun de ses discours, le candidat républicain ne manque pas de dresser le portrait d’une Californie exsangue sous le poids des impôts et des clandestins, un portrait apocalyptique qui fait ressembler « les sept cercles de l’enfer à une station balnéaire », selon l’expression du chroniqueur du Los Angeles Times Mark Barabak. Le 12 octobre, à Coachella, à 200 kilomètres de Los Angeles, une vallée agricole peuplée à 98 % de Latinos, l’ancien président l’a répété : « Nous n’allons pas laisser Kamala Harris faire à l’Amérique ce qu’elle a fait à la Californie ».
En 2020, Joe Biden avait enregistré quelque 5 millions de voix de plus que Trump (soit 63,5 %) en Californie. En 2016, Hillary Clinton y avait obtenu 8,8 millions des 65,8 millions de voix qui lui avaient permis de remporter le vote populaire – mais pas l’élection, ravie par Trump bien qu’il soit devancé de 2,87 millions de voix. Le « Golden State » est celui qui a le plus à se plaindre du système électoral au suffrage indirect : avec 39 millions d’habitants et 54 grands électeurs, l’Etat le plus peuplé et le plus riche du pays (l’équivalent de la cinquième puissance du monde) se trouve ramené, proportionnellement, au même poids que des Etats bien moins peuplés. A lui seul, le comté de Los Angeles (10 millions d’habitants) est plus peuplé que le Michigan ou le Wisconsin, deux des sept Etats clés de cette élection.
Mais la Californie pèse lourd pour ce qui concerne le Congrès. Avec 52 élus à la Chambre des représentants – 40 démocrates, 12 républicains –, la délégation californienne est la plus importante de l’Union. Cette année, les républicains sont optimistes sur leurs chances de remonter quelque peu la pente. Dans un Etat où ils contrôlent tous les rouages du pouvoir, les démocrates ont été pilonnés par leurs adversaires sur leur incapacité à régler la question des sans-abri, les tarifs devenus extravagants (notamment pour l’énergie et les assurances habitation, en raison du risque d’incendies)… et « l’exode », selon les républicains, de milliers de résidents en raison de problèmes de logement et d’un niveau d’impôts trop élevé. Cette vague de départs reste toutefois très relative : après trois ans de baisse, la population a repris sa croissance. Les départs vers le Texas – qui ont constitué pendant deux ans, le mouvement interétatique de population le plus important du pays – ont été compensés par les arrivées de personnes venues travailler dans le domaine des nouvelles technologies. Et nombre de ceux qui étaient partis sont revenus.
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