En Algérie, « l’exil forcé » pour toute voix dissidente

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La militante franco-algérienne Amira Bouraoui à sa sortie de prison près de la ville de Tipaza, à l’ouest d’Alger, le 2 juillet 2020.

On ne sait jamais. Même à des milliers de kilomètres d’Alger, des paroles et des écrits critiques envers le régime peuvent mettre en danger. Pour avoir manifesté à Paris, Madrid ou Montréal, signé une pétition ou une tribune, laissé – ou liké – un commentaire sur Facebook, lâché quelques mots dans la presse ou récité un poème lors d’une marche, une partie de la diaspora algérienne préfère renoncer à retourner au pays, effrayée à l’idée d’être arrêtée une fois sur place. L’écrivain franco-algérien Boualem Sansal, 80 ans, interpellé à l’aéroport d’Alger le 16 novembre, avant d’être accusé d’« atteinte à l’intégrité du territoire national », est le dernier exemple de cet arbitraire du régime.

« La peur s’est malheureusement diffusée et a traversé les frontières », déplore Aïssa Rahmoune, secrétaire général de la Fédération internationale pour les droits humains. L’avocat algérien, réfugié politique en France, rappelle que le risque d’arrestation « est bien réel. Et cela concerne beaucoup de gens : des anonymes, de simples militants, des journalistes, des réalisateurs ou des opposants de renom ». En premier lieu, les sympathisants du Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie et du mouvement islamiste Rachad, deux organisations classées terroristes en Algérie.

Depuis le printemps 2020, aidées par l’épidémie de Covid-19, les autorités algériennes ont repris en main le pays secoué par le Hirak, le soulèvement pacifique et populaire qui avait tenté, un an plus tôt, de « dégager le système ». La répression s’est intensifiée contre toutes les voix dissidentes à l’intérieur du pays et contre celles venant d’ailleurs, particulièrement de France.

« Il est arrivé que des ambassadeurs en poste à Alger alertent des binationaux sur les dangers qu’ils encourent en se rendant en Algérie », confie un diplomate français. Il relève, aussi, qu’Alger a demandé à Paris, à plusieurs reprises, que des opposants lui soient « livrés », sans obtenir gain de cause.

« Pousser les militants à s’autocensurer »

Le 26 novembre, l’Institut du Caire pour les études des droits de l’homme a publié un rapport qui dénonce la « traque » des opposants à l’étranger. Intitulé « Algérie, recours à des méthodes de répression transnationale pour étouffer la dissidence », le document indique que « le gouvernement algérien envoie un message clair : personne n’est hors d’atteinte. Il dissuade ainsi les opposants et militants potentiels ».

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