Elections européennes : sociologie du doute

3883


La façade du Parlement européen, à Strasbourg, le 10 avril 2024.

L’évolution des intentions de vote dans une campagne électorale dépend traditionnellement de deux facteurs. D’une part, les scores peuvent se modifier quand la campagne s’accélère et que des électeurs qui ne pensaient pas aller voter au début de la campagne décident finalement de se mobiliser. Dans ces conditions, le corps électoral grossit à la suite de l’afflux de ces nouveaux électeurs, et les rapports de force préalablement constatés sont à même de se modifier.

Sur ce premier point, à moins de six semaines des élections du Parlement européen, force est de constater que la campagne ne démarre pas vraiment, tout du moins dans la façon dont elle est perçue par les Français, selon la quatrième vague de l’enquête électorale réalisée par Ipsos, en partenariat avec le Cevipof, l’Institut Montaigne, la Fondation Jean Jaurès et Le Monde, menée du 19 au 24 avril. Début mars, seulement 56 % d’entre eux se disaient intéressés par le scrutin, et ce chiffre n’a quasiment pas évolué en l’espace d’un mois (57 %).

De manière assez logique, cette absence de dynamique d’intérêt se répercute dans l’intention de participer au scrutin : sur la même période, la certitude d’aller voter est passée de 44 % à 45 %. L’abstention électorale qui s’annonce donc importante est déjà un phénomène en soi, qui vient « bousculer » la stabilité des démocraties occidentales.

Les femmes plus hésitantes

Si le corps électoral reste donc relativement similaire d’ici au 9 juin, les dynamiques électorales ne pourront se réaliser que grâce au second facteur à même de générer des évolutions d’intentions de vote : des transferts de voix d’un candidat à un autre. A ce niveau, le choix électoral est en effet encore loin d’être cristallisé : 63 % des électeurs se disent certains de leur choix de bulletin de vote, un chiffre qui n’a pas évolué en six semaines.

D’ailleurs, ces hésitations sont un phénomène de plus en plus structurant dans des démocraties marquées par une baisse de l’attachement partisan et une forte volatilité électorale : lors du premier tour de l’élection présidentielle de 2022, un quart des électeurs déclaraient avoir hésité dans leur choix de vote, jusqu’au dernier moment.

Mais, justement, qui sont ces électeurs n’étant, à l’heure actuelle, pas certains de leur choix ? Si plus d’un tiers de ceux qui sont certains d’aller voter hésitent toujours sur le candidat, les facteurs sociodémographiques jouent à plein dans cette indécision. Les femmes sont beaucoup plus hésitantes que les hommes (42 % des électrices considèrent que leur choix n’est pas définitif, contre 32 % des électeurs). Et l’âge joue également un rôle prépondérant : si 43 % des moins de 35 ans considèrent que leur choix peut encore évoluer, ce chiffre passe à 38 % chez les 35-59 ans et à 33 % chez les 60 ans et plus.

Il vous reste 57.59% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.



Source link