« Echouer à prendre en Europe le relais d’une science contestée aux Etats-Unis serait ouvrir un boulevard à la Chine »

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Il faut parfois savoir s’inspirer de la Chine. En 2009, nous avions rencontré à Pékin un physicien de 39 ans, Ding Hong, fraîchement installé dans son laboratoire flambant neuf à l’Institut de physique de l’Académie des sciences chinoise. Ding Hong venait de rentrer des Etats-Unis, où il était parti en 1990, étudiant désillusionné par le massacre de la place Tiananmen. Entre-temps, il était devenu citoyen américain, avait fondé une famille et décroché une chaire à vie au département de physique du Boston College (Massachusetts).

Qu’est-ce qui avait bien pu le pousser à quitter cette vie rêvée ? La décision de la Fondation nationale scientifique américaine, qui subventionnait ses recherches au Boston College, de suspendre son financement dans le cadre de mesures d’économies. La crise financière venait de frapper. Hongkong avait fait des offres d’embauche au jeune physicien, Boston College avait fait une contre-proposition, l’Académie des sciences chinoise avait surenchéri. « Globalement, en matière de recherche et de financement, c’était la meilleure offre, nous avait confié Ding Hong. Ici, je peux me concentrer sur mon travail scientifique fondamental. »

Seize ans plus tard, ce n’est pas la crise financière qui sème la panique dans les universités et les centres de recherche américains mais une révolution idéologique menée tambour battant par l’administration Trump et son mauvais génie, Elon Musk. Du jour au lendemain, des budgets sont amputés. Les institutions les plus prestigieuses se trouvent menacées de perdre des subventions fédérales de centaines de millions de dollars si elles ne cèdent pas à des exigences politiques contraires à leur éthique.

Certaines anticipent, licencient, renoncent à recruter. Des étudiants étrangers contestataires sont arrêtés en pleine rue par des policiers en civil. De sages professeurs se mettent à voyager à l’étranger sans leur téléphone usuel ni leur ordinateur de peur de devoir les soumettre au retour à la police de l’immigration. La liberté académique est attaquée.

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