Dans les Landes, Maylis Daubon condamnée à trente ans de prison pour avoir empoisonné ses deux filles, dont l’aînée est morte

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Les preuves présentées dans la salle d’audience de la cour d’assises du département des Landes, à Mont-de-Marsan, lors du procès de Maylis Daubon, le 3 décembre 2025.

Maylis Daubon, accusée d’avoir empoisonné avec des médicaments ses deux filles, dont l’une est morte, a été condamnée à trente ans de réclusion criminelle par la cour d’assises des Landes, à Mont-de-Marsan, mercredi 3 décembre. Cette peine est assortie d’une période de sûreté de vingt ans, supérieure à celle de quinze ans requise par l’avocat général, qui avait dénoncé la « soumission chimique » dans laquelle s’était retrouvée la fille aînée, Enea, morte à l’âge de 18 ans.

La présidente de la cour d’assises, Emmanuelle Adoul, a justifié cette décision, prise à la majorité, « au regard de la gravité des faits, de la mort d’Enea, de leur durée, des modes opératoires et des préjudices pour les parties civiles ». « La cour a estimé [la] culpabilité acquise » sur les faits concernant Enea et « la vie de Luan a été sauvée du fait de [l’] interpellation », a-t-elle ajouté. Dans son box, Maylis Daubon, âgée de 53 ans, est restée stoïque et sans regard pour la cour, selon un journaliste de l’Agence France-Presse sur place. Elle a dix jours pour faire appel.

Enea, déscolarisée depuis plus d’un an et souffrant de troubles psychologiques, a été prise d’une crise de convulsions le 13 novembre 2019 au domicile familial. Sa mort a été causée par une prise de Propranolol, un bêta-bloquant qui ralentit l’activité du cœur, à un taux « dix fois supérieur à la dose thérapeutique », selon l’enquête.

L’avocat général, Marc Bourragué, a présenté Enea « comme une enfant affaiblie par la surmédicalisation, avec une soumission chimique qui entraîne une abolition du libre arbitre ». Pour le magistrat, « l’absorption de Propranolol » a eu lieu le matin des faits. « On lui donne ou elle le prend, je ne peux l’affirmer, mais l’absorption a été faite dans des conditions d’emprise », a-t-il dit.

« Des défauts et des comportements pas toujours adaptés »

Selon les réquisitions de l’avocat général, « rien » ne pouvait étayer la thèse du suicide de la fille aînée, avancée par l’accusée pour clamer son innocence. Pour le ministère public, la mère avait deux mobiles : « J’ai une emprise sur quelqu’un qui va m’échapper, je ne peux pas le supporter, je le tue. C’est le syndrome de Münchhausen par procuration. Et la détestation du père, tellement forte. »

Yannick Reverdy, ancien international français de handball, avait divorcé de Maylis Daubon, qui l’accusait de violences, en 2009 et avait ensuite perdu contact avec ses filles. Au moment du verdict, il était en larmes, comme sa compagne et les grands-parents.

Confrontée aux « incohérences » relevées dans ses déclarations, aux soupçons de falsification d’ordonnances, l’accusée a persisté à l’audience dans ses dénégations. « On ne peut pas se cantonner à des hypothèses pour asseoir son intime conviction », avait plaidé Gérard Danglade, l’un des deux avocats de Maylis Daubon, demandant aux jurés de « juger une mère avec des défauts et des comportements pas toujours adaptés », mais en évacuant des « accusations fondées essentiellement sur sa personnalité ».

Jugée coupage d’instigation d’assassinat envers son ex-mari

L’avocat général n’a pas apporté la « preuve de la culpabilité », avait pour sa part allégué Carine Monzat, son autre conseil, décrivant méticuleusement Enea comme une adolescente « aux troubles psychiatriques sévères et chroniques » dont les intentions suicidaires étaient connues de certains de ses proches.

La fille cadette, Luan, a aussi maintenu pendant le procès que sa mère n’était « pas coupable », revenant sur leur enfance « heureuse » mais « compliquée » par le divorce des parents et des violences imputées à son père. Ce dernier accuse son ex-femme de s’être servi de ses filles comme « outil de sa vengeance » contre lui.

Devant la cour, un expert psychiatre a décrit « l’emprise » que la mère exerçait sur ses filles, vouée à « s’aggraver » à mesure qu’elles grandiraient, doublée d’une volonté d’« éliminer le père ». Outre l’empoisonnement d’Enea et Luan, Maylis Daubon était aussi soupçonnée d’avoir voulu faire assassiner son ex-mari en soudoyant des codétenues à la prison de Pau. Mme Daubon a dénoncé des « ragots de prison » à ce sujet, mais la cour l’a également déclarée coupable de ces faits.

Le Monde avec AFP

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