dans les campagnes françaises, une riche cohabitation « franglosaxonne »

2070


Anna Woolford ne sait plus où donner de la tête. La file d’attente n’en finit pas de s’allonger face à son comptoir, malgré le rythme soutenu auquel elle encaisse les emplettes. C’est au tour d’un couple de quinquagénaires de se planter devant la retraitée rondelette et joviale. Visiblement satisfaits de leur visite, ils déposent leurs trouvailles en vrac : un service en porcelaine de style asiatique, un tee-shirt à l’effigie des Guns & Roses, un mug aux couleurs du Manchester United, une pile de livres dans la langue de Shakespeare et une paire de jumelles hors d’âge. L’homme sort un billet de 10 euros pour régler l’ensemble. « Pour les pâtisseries, c’est à l’autre caisse, n’est-ce pas ? », s’enquiert une dame coiffée d’un bob en patchwork.

Dans la queue, un adolescent peste, frustré de ne pas avoir déniché la paire de Dr. Martens que ses parents lui avaient fait miroiter pour le convaincre de les suivre dans ce local de plus de 1 000 mètres carrés, un ancien magasin de meubles situé sur la commune charentaise d’Ansac-sur-Vienne (environ 800 habitants). Les mardis et vendredis, une clientèle hétéroclite – mais largement anglophone – déferle dans ce charity shop (« magasin solidaire ») ouvert en 2015 par l’association Hope, créée en 2009 par quatre Anglaises ayant élu domicile dans les Deux-Sèvres, un des départements voisins.

L’organisation caritative est spécialisée dans la revente d’objets issus de dons de particuliers – notamment d’habitants des environs originaires du Royaume-Uni – et reverse ses bénéfices à différents projets de défense de la cause animale. Arrivée dans la région en 2006 avec son mari, Anna Woolford travaille bénévolement pour l’association depuis une dizaine d’années. Elle occupe aujourd’hui les fonctions de secrétaire et de trésorière. Après une vie à mille à l’heure en Angleterre, elle est venue, en couple, chercher un petit coin de nature financièrement accessible dans une région tranquille au climat tempéré. « Nous voulions être autosuffisants, avoir notre propre ferme avec nos animaux, vivre de notre terre, avoir une vie plus simple et de meilleure qualité », énumère l’ancienne directrice de clientèle chez un fabricant d’ascenseurs. « Bêtement, nous nous sommes pris au début pour des pionniers, se remémore-t-elle en riant. Et nous avons eu un choc en découvrant qu’il y avait de nombreux Britanniques au village ! »

Il vous reste 86.48% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.



Source link