Dans le sud du Brésil, les bolsonaristes entre nostalgie et désir de tourner la page

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En ce 30 août, Cedenir Simon paraît surpris, et presque déçu. « On ne reçoit ni jet d’œufs, ni injures, ni menaces ! », constate le candidat du Parti des travailleurs (PT) à la mairie de Brusque, dans le sud du Brésil. « Cedê » (son surnom) tracte avec quelques militants au terminal routier de la ville. Certes, la plupart des badauds l’ignorent poliment, mais certains acceptent tout de même de dialoguer. « Les gens écoutent à nouveau. Les choses bougent ! », se réjouit-il.

Cedenir Simon (au centre), candidat PT à la mairie de Brusque (Brésil), en campagne à la gare routière de la ville, le 1ᵉʳ septembre 2024.

Dans cette ville de 150 000 âmes de l’Etat de Santa Catarina, c’est peu dire que la gauche ne part pas favorite au scrutin du 6 octobre, qui verra le Brésil renouveler ses plus de 5 500 conseils municipaux. Lors de l’élection présidentielle de 2022, l’actuel chef de l’Etat, Luiz Inacio Lula da Silva, n’a recueilli à Brusque que 21,4 % des voix, contre 78,6 % pour l’extrême droite de Jair Bolsonaro (50,9 % et 49,1 % respectivement au niveau national).

Mais, en deux ans, le fond de l’air semble avoir changé. Les partisans du PT arborent désormais sans crainte et en public l’étoile rouge, emblème du parti. « On est de gauche et on ne s’en cache pas ! », claironne Cedê, visage jovial, qui a fait de sa proximité avec Lula un argument de campagne. « Plusieurs de ses ministres sont mes amis. Je peux pousser la porte de leurs bureaux sans rendez-vous ! », se vante-t-il en souriant.

Plantée à 30 kilomètres de l’océan, Brusque n’est pas une cité très riante. Ce puissant pôle du textile, prospère capitale de la maille brésilienne, déploie ses usines et ses immeubles gris plomb le long du rio Itajai-Mirim. Seule excentricité au tableau : de gros bâtiments ornés de tourelles évoquent vaguement l’architecture à colombage de l’Elbe ou du lac de Constance. L’un d’entre eux abrite la mairie. Fondée par des migrants allemands, puis italiens et polonais, Brusque est une ville de culture germanisante. « Ici, le travail est la valeur-clé et sous-entend probité, ponctualité et dévouement », liste Leandro Hyarup, 43 ans, entrepreneur dans la filature.

Vue de la ville de Brusque, dans l'Etat de Santa Catarina (Brésil), le 2 septembre 2024. De nombreux habitants ont des origines allemandes et l’architecture de la halle centrale de la ville témoigne de cet héritage.

Le PT a ponctuellement gouverné Brusque avec Paulo Eccel (2009-2013). Un accident de parcours, selon Leandro Hyarup. « Le rejet du PT est très fort, dit-il. Les Brusquenses n’ont jamais pardonné à Lula ses affaires de corruption. Ils sont opposés à l’assistanat et ont l’impression de recevoir trop peu d’argent en comparaison avec la quantité d’impôts qu’ils paient à la Fédération. »

Trois candidats conservateurs

Dans cette cité un peu austère, les écoles publiques civico-militaires sont en plein essor. Brusque compte quatre de ces établissements où la discipline est assurée par d’anciens officiers et où les élèves entonnent tous les jours et la main sur le cœur l’hymne national. « Il s’agit de retrouver le sens du patriotisme et du respect : deux valeurs qui ont été oubliées ces dernières années », explique Ana Vani Giraldi, 58 ans, directrice de l’école civico-militaire Isaura Gouvêa Gevaerd, située dans le sud de la ville.

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