
Qui décrochera le premier son téléphone ? Xi Jinping, l’idéologue marxiste-léniniste, persuadé de la supériorité du socialisme à la mode chinoise et de la vocation de son pays à la prépondérance mondiale ? Ou Donald Trump, génie politique autoproclamé ivre d’une puissance qui, au gré de ses humeurs, l’autorise à jouer avec l’économie mondiale comme si elle lui appartenait ? Le Chinois silencieux ou le bonimenteur américain ?
« Nous attendons un coup de téléphone de Pékin », dit Trump. Soumettant la planète au feu de ses droits de douane, le roi de la négociation n’entend pas qu’on lui résiste : tout le monde doit venir quémander sa ristourne. Mais, avec Xi, le golfeur de Mar-a-Lago se heurte à la Grande Muraille. Pas question de céder à Washington. Les deux titans de la cour de récréation globale sont entrés en guerre. Cible première de l’offensive trumpiste, la Chine réplique, coup pour coup. Les étiquettes valsent : 125 % sur les exportations en provenance des Etats-Unis ; 145 % sur les produits chinois à destination de l’Amérique. A ce niveau, les échanges s’arrêtent entre les deux premières économies de la planète.
Pékin ne veut pas négocier le couteau sous la gorge et refuse le racket de la Maison Blanche : tu fais des concessions commerciales aux Etats-Unis ou tu subis les droits de douane que l’administration Trump te réserve… Washington aurait décidé des exceptions importantes pour les exportations chinoises de smartphones, d’ordinateurs portables et autres matériels informatiques. Pour autant, rien n’est vraiment sûr avec Trump et nul ne saisit les ressorts de ses revirements. Peut-être son dernier score au golf ? Cette fameuse stratégie de l’insécurité pèse sur l’économie américaine.
Ce qui se joue entre Pékin et Washington va bien au-delà de l’économie. Le conflit commercial est le dernier épisode du duel du siècle : la Chine et les Etats-Unis s’affrontent pour la prééminence mondiale. Protectionniste depuis les années 1980, Trump croit dans la force renouvelée d’une Amérique qui vivrait en quasi-autarcie – à tout le moins dotée d’un appareil de production à la mesure de sa soif de consommation. La puissance est dans l’autonomie. En revanche, Xi compte sur la mondialisation pour assurer la domination de la Chine. Le pays s’est doté d’une industrie manufacturière monstrueuse dont l’ambition, dans certains secteurs, est de conquérir la plus grosse part du marché mondial. La prépondérance par la grâce du libre-échange.
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