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La comparaison internationale en éducation peut facilement être piégeuse : on en attend à tort des solutions miracles, qu’il suffirait de copier en important quelques « bonnes pratiques ». Hors contexte. Hors cultures.
Cela dit, le regard sur d’autres systèmes d’école n’est pas oiseux, en ce qu’il permet de découvrir ce qui semble étrange, et par là de décoller de la référence au seul système que chacun connaît. Des problèmes qui semblent indépassables du côté français des Alpes, par exemple, ne se trouvent tout simplement pas posés du côté italien… Si nous pensons par exemple à l’échec en 6e, à l’orientation stressante et pour beaucoup subie en cours et fin de collège, ou encore à cette propension du système français à fabriquer du ghetto, qu’il s’agisse de certains établissements ou de certaines sections ou filières… Acceptons quelques éléments de dépaysement, le temps de la lecture de cette tribune !
Commençons par la fin du collège en Italie : un examen et un diplôme, du nom de licenza media. La licenza media parvient à réaliser cette gageure d’être à la fois un examen auquel on n’échoue pas et un diplôme reconnu par les acteurs. La culture scolaire française conduit à se récrier en lisant cela, tant est ancrée l’habitude de déconsidérer un examen dont le taux de succès est très (trop ?) élevé.
Or, en Italie, il y a bien un examen en fin de « collège », comptant pour 50 % des points, avec trois épreuves « classiques » (italien, mathématiques et anglais), et une épreuve orale multidisciplinaire d’une demi-heure, appelée colloquio, à laquelle tous les professeurs assistent et qui permet en quelque sorte un bilan complet des acquis.
Tradition du rattrapage
Cette importance accordée au regard professoral a d’autres manifestations : ce sont les départements disciplinaires des collèges qui, dans le cadre d’une réglementation nationale précise, conçoivent les épreuves, et la partie que nous appellerions « contrôle continu » (50 %) garde le souvenir des trois ans du collège. Les enseignants suivant souvent leurs élèves d’une année sur l’autre, il s’agit d’un regard dans la profondeur et la durée sur la progression de l’élève.
Mais le point le plus important réside dans ce fait que l’élève n’a le droit de se présenter à l’examen que si l’équipe de ses professeurs estime qu’il est prêt. La continuité des études et la fréquente permanence des professeurs d’une année sur l’autre permettent de voir venir et de traiter le risque en amont. Si cette possibilité de ne pas être admis à se présenter aux épreuves ne touche que de l’ordre de 3 % à 4 % des effectifs, les deux facteurs (prise en compte des résultats et nécessité de décrocher le « droit » de se présenter) contribuent à garder les élèves au travail et à conserver un sens clair à la licenza media. Au total, le taux d’échec à un examen qui n’est pas là pour cela est très faible (dans les 2 %).
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