« Avec la guerre éclair des droits de douane de Donald Trump, la géopolitique prend le pas sur le primat de la production et des échanges »

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Les patrons vont devoir se mettre sérieusement à la géopolitique – et avec de nouveaux outils – pour préparer leurs entreprises à un monde plus incertain et plus chaotique. Le Brexit, la pandémie de Covid-19, la politisation du modèle d’affaires chinois et la guerre en Ukraine ont bouleversé l’environnement des affaires depuis une dizaine d’années.

Et voilà que la guerre éclair des droits de douane déclenchée par Donald Trump, en sapant les fondements libre-échangistes sur lesquels repose l’ordre mondial depuis 1945, amplifie une tendance visible depuis une décennie : la géopolitique prend le pas sur l’« économisme », cette vision du primat de la production et des échanges sur toute autre considération, encore dominante chez les chefs d’entreprise.

Les dirigeants des multinationales se sont enfermés dans un certain confort intellectuel, mobilisés par la gestion quotidienne, les fusions-acquisitions et la conquête de nouveaux marchés. A l’unisson des élites politiques, intellectuelles et médiatiques, ils postulaient que les grands « animaux politiques » étaient aussi rationnels qu’eux. Non, le Royaume-Uni ne quitterait pas l’Union européenne ; M. Trump ne serait pas élu en 2016, ni réélu en 2024, il ne mènerait pas de guerre tarifaire totale et ne fragiliserait pas l’OTAN ; Vladimir Poutine n’envahirait pas l’Ukraine… Et pourquoi donc ? Parce qu’ils n’avaient aucun intérêt économique à le faire.

Les multinationales ont de multiples capteurs et savent identifier les « risques-pays ». CMA CGM, Safran ou TotalEnergies intègrent des ambassadeurs et des généraux rompus aux crises diplomatiques et sécuritaires. Elles se nourrissent des études du World Economic Forum ou du Fonds monétaire international (FMI). Banques d’affaires (Goldman Sachs, Lazard…), cabinets en stratégie (McKinsey, Boston Consulting Group…), gestionnaires d’actifs (BlackRock…) et « big four » de l’audit (Deloitte, EY, KPMG, PwC) se bousculent pour monnayer leurs analyses. Des deux côtés de l’Atlantique s’ouvrent des boutiques créées par des diplomates de carrière, des experts du renseignement et des militaires à la retraite.

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