Marine Le Pen a rongé son frein pendant sept longues heures, mercredi 2 octobre, avant de pouvoir dire ce qu’elle avait sur le cœur, un peu avant 21 heures. La présidente du tribunal, Bénédicte de Perthuis, a un calendrier, et s’y tient.
Il était question pour l’ancienne présidente du Rassemblement national (RN, Front national au moment de faits, FN) de donner « quelques éléments de contexte » au procès des assistants du Parlement européen qui s’est ouvert lundi à Paris. Le FN y est accusé d’avoir profité du budget européen pour « nourrir » le parti.
Le tribunal a projeté des tableaux qui démontrent, pour l’accusation, que les 27 prévenus ont détourné 3 213 000 euros de 2004 à 2016. Mais l’affaire est complexe, et le RN, personne morale, si l’on peut dire, est aussi poursuivi pour « complicité et recel de détournement de fonds publics ». Il doit donc répondre, aussi, des contrats d’assistants parlementaires qui n’ont pas été individuellement poursuivis : la note s’élève du coup à 4 503 000 euros. Stupeur des avocats à qui avaient échappé ces lignes décisives de l’acte d’accusation.
Autre déconvenue, la période de prévention, celle durant laquelle les faits sont poursuivis, pourrait être étendue : le parquet va prendre de nouvelles réquisitions. Au grand dam de Marine Le Pen : « Nous avons été interrogés sur une prévention précise par le juge d’instruction, a dit la députée, et aujourd’hui on nous dit que ça va peut-être être cinq ans avant ou cinq ans après ! » Elle souhaitait aussi indiquer qu’il y avait dans le dossier « énormément d’idées préconçues, qui ont été fabriquées par la partie civile [le Parlement européen]. On a essayé de nous engager dans un tunnel dont on ne peut pas ressortir ».
L’administration « fait des erreurs »
La présidente du RN assure que « la direction du Parlement européen n’est pas neutre, elle est politique ». D’ailleurs l’administration, « on a l’impression qu’elle est ceinte de blanc, mais elle fait des erreurs comme toutes les administrations », en perdant par exemple des dossiers. Elle estime ensuite « qu’il serait malheureux de ne pas admettre que nous sommes la bête noire du Parlement européen : l’idée qu’il puisse y avoir des députés qui s’opposent à cette construction-là de l’Union européenne, c’est quelque chose qui dérange, alors que nous sommes élus pour ça ».
Suit un réquisitoire sévère contre les enquêteurs de l’Office européen de lutte antifraude (OLAF), à l’origine de l’enquête, qui aurait « impulsé ses idées au Parlement, qui les a impulsées dans l’instruction judiciaire ». L’Office aurait attendu juin 2014, lorsque les députés européens RN sont passés de 3 à 24, pour lancer une enquête sur le parti, avant, en plein mois de juillet de l’année suivante, de suspendre le traitement de tous les assistants du FN – pour finalement n’en suspendre que six.
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