« Made in USA. » Une banderole déployée par le Hezbollah, devant un enchevêtrement de dalles de béton et de murs éventrés, accueille les passants sur la petite place de Maaysra. Des visages de femmes, d’adolescentes, d’enfants et d’hommes sont affichés çà et là, le sourire figé pour toujours.
C’est ici, le 25 septembre, qu’une frappe d’Israël a tué seize habitants, dans un carré de trois maisons mitoyennes – peut-être au moyen d’un missile fourni par les Etats-Unis, comme le sous-entend la banderole. Petite enclave chiite située dans le Kesrouan, une zone au peuplement majoritairement chrétien, à 40 kilomètres au nord de Beyrouth, Maaysra est la première localité de la région à subir un raid aérien meurtrier depuis le début du conflit. Jeudi 3 octobre, un nouveau bombardement a visé une maison du village, niché à 600 mètres d’altitude, sans faire de victimes. « Pendant la guerre de 2006, les Israéliens avaient attaqué deux ponts à Jounieh [20 kilomètres plus bas], mais, de mémoire, c’est la première fois qu’un village des environs est bombardé », précise Georges Aoun, le maire de Zaaitra, une localité chrétienne voisine.
« Je pensais qu’il était impossible que la guerre me rattrape ici… » Sohad Quetiche estimait avoir mis suffisamment de distance entre lui et les affrontements qui secouent son village natal. Mais cet homme originaire de Houla, un village du sud du Liban, a été blessé lors du bombardement du 25 septembre. Sa mère, Saada Ayoub, 77 ans, a été tuée. Son épouse et ses quatre enfants ont également été blessés.
« J’ai vu comme un flash »
C’est vers 10 heures du matin qu’une première frappe a visé une maison qui appartiendrait à la famille d’un cadre du Hezbollah, le cheikh Mohamed Amro, présenté comme le responsable civil du groupe dans la région. S’il n’était pas présent sur les lieux, dix membres de sa famille ont été tués. Six déplacés venus du sud du pays et qui logeaient dans des demeures contiguës ont également perdu la vie, dont la mère de M. Quetiche. Parmi ces victimes, un homme n’était arrivé que la veille dans le village, qui abrite cent cinquante familles de déplacés. Il n’a toujours pas été identifié.
Les restes du corps d’un enfant de 4 ans, Amir Wissam Hussein, déchiqueté par l’explosion, n’ont toujours pas été retrouvés. Dans le cimetière du village, les six victimes venues du sud ont été enterrées de façon provisoire. Des jouets et des peluches sont posés sur les tombes des plus jeunes. Alors que des volontaires entretiennent le lieu, Sari, 6 ans, le plus jeune des enfants de la famille Quetiche, s’assied de longues minutes sur la tombe de sa cousine, mutique.
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