Au Japon, plusieurs décisions de justice en faveur du mariage pour les couples de même sexe laissent penser que la question n’est plus de savoir si le gouvernement japonais va engager des débats à ce sujet, mais quand. Jeudi 14 mars, les tribunaux de Tokyo et Sapporo (dans le nord de la péninsule) ont reconnu que l’interdiction du mariage des personnes LGBT posait un problème d’ordre constitutionnel dans le seul pays du G7 à ne pas reconnaître ce droit.
La Haute Cour de Sapporo y voit une infraction au texte fondamental, qui affirme l’égalité de tous devant la loi. Confortant une décision prise en 2021 en première instance, le tribunal a ajouté qu’en 2024 « la compréhension par la population [des droits des LGBT] » a progressé au point que le mariage n’est plus considéré comme étant « réservé aux couples hétérosexuels », ni « dans le seul but de la reproduction ».
A Tokyo, le jugement allait dans le même sens même si le tribunal juge prématuré d’« accorder aux couples de même sexe l’accès à un système de mariage identique à celui des couples hétérosexuels ». Il estime que « le soutien de la population n’est pas encore suffisant ».
Les décisions ont été rendues dans le cadre d’une campagne baptisée « Liberté de se marier pour tous », lancée en 2019 dans cinq départements avec l’appui de l’association Mariage pour tous (MFAJ). Eri Nakatani, qui fait partie des trente-cinq plaignants du collectif à l’origine de la campagne, a salué une « étape importante dans l’évolution du pays » vers la reconnaissance du droit des personnes du même sexe à « vivre en famille en tant que couples ». Pour Mme Nakatani, « la pression est sur le Parlement, qui n’a jamais abordé la question ». « Le temps est compté, j’espère que la législation sera bientôt promulguée », s’interroge Shino Kawachi, une autre plaignante.
Décalage avec l’opinion
En ajoutant les jugements de Tokyo et de Sapporo, six des sept décisions rendues depuis le début de la campagne vont dans le même sens. Seul le tribunal d’Osaka (ouest) a estimé, en juin 2022, que l’interdiction du mariage homosexuel ne pouvait pas être considérée comme discriminatoire ou inconstitutionnelle, car, selon la législation en vigueur, le mariage « ne peut être fondé que sur le consentement mutuel des deux sexes ».
Ces nouvelles décisions sont « très importantes car elles clarifient le fait que le point central du mariage n’est pas de savoir si les personnes sont du même sexe mais qu’il garantit un soutien mutuel entre les personnes », a souligné Masayuki Tanamura, spécialiste des affaires familiales à l’université de Waseda. Le chercheur appelle le Parlement à s’appuyer sur les décisions prises pour lancer des discussions sur le mariage pour tous.
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