Les profondes transformations du monde bousculent les certitudes et ébranlent les positions acquises, elles appellent des réponses nouvelles que le système politique est bien incapable de proposer, pas plus à gauche qu’à droite. Non seulement cet effort n’a pas été sérieusement entrepris, mais la déception est grande par rapport aux espoirs des années 2010.
Que d’occasions manquées, ne serait-ce que par le pouvoir actuel ! Les dizaines de milliers de cahiers de doléances, rédigés en réponse à l’appel à un « grand débat national » après la crise des « gilets jaunes », vite enfouis dans des cartons, le Conseil national de la refondation mort avant même d’avoir fonctionné : chaque fois, la verticalité du pouvoir a pris le dessus et étouffé toute réflexion collective.
La tyrannie du temps (illusion d’agir en multipliant les projets de loi, succession de campagnes électorales, programmes politiques bâtis sur un coin de table…) a empêché depuis des années d’associer vraiment les citoyens à la définition et la mise en œuvre de l’action publique et dispensé le monde politique de toutes ces réflexions de fond.
Crise de régime et pays ingouvernable ? Non !
De nombreux collectifs se forment au sein de la société civile, un peu partout des initiatives locales fleurissent, les expériences de démocratie délibérative confirment la capacité des citoyens à se saisir ensemble de sujets réputés complexes : autant de signes d’une société en mouvement, autant de perspectives esquissées, mais qui se heurtent au plafond de verre d’un cadre conceptuel et institutionnel hérité du passé et inadapté au monde qui vient.
Où est la réflexion sur les valeurs et sur la place des responsabilités mutuelles dans un monde interdépendant ? Où est la réforme de la gouvernance en reconnaissance du rôle central des territoires de vie et du fait qu’aucun problème ne peut être résolu à un seul niveau ? Où est la pensée nouvelle sur l’économie pour inventer des réponses au réchauffement climatique dans le respect de la justice sociale ? Où est la pensée nouvelle sur la monnaie, condition pour qu’une augmentation forte des bas salaires ne se traduise mécaniquement par le creusement du déséquilibre commercial ?
Alors, après les législatives, crise de régime et pays ingouvernable ? Non ! Au contraire, une chance historique que notre pays doit saisir en mettant à profit ce répit à la frénésie normative pour organiser une vaste réflexion collective permettant à notre pays de redéfinir sa place dans un monde interdépendant en associant à cet effort toutes les forces vives du pays par une démarche inclusive de dialogue, de confrontation sereine des différentes transformations structurelles à entreprendre, en recherchant le noyau dur des faits et des convictions partagées plutôt que les différences permettant de se singulariser.
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