Alexeï Navalny, même mort, continue d’embarrasser les autorités russes

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Anatoly Navalny (à droite) et Lioudmila Navalnaïa, les parents d’Alexeï Navalny, quittent la colonie pénitentiaire IK-6 à Melekhovo, où l’opposant russe avait été incarcéré. Le 19 juin 2023.

A l’été 2020, après l’empoisonnement d’Alexeï Navalny par un agent innervant, les proches de l’opposant russe ne purent avoir accès, durant deux jours, ni à sa chambre d’hôpital, ni à des informations claires et crédibles. Ioulia Navalnaïa, son épouse, et Kira Iarmych, sa porte-parole, furent baladées sans ménagement, contraintes d’entendre les communiqués de médecins bafouillants (« déséquilibre glucidique » fut le premier diagnostic) et trouvant derrière chaque porte des hommes refusant de décliner leur identité.

Alexeï Navalny est aujourd’hui mort et la farce sinistre reprend. Elle a désormais pour héroïne Lioudmila Navalnaïa, la mère de l’opposant, qui parcourt le Grand Nord accompagnée du dernier avocat de M. Navalny à ne pas être en prison.

« Syndrome de mort subite »

La femme de 69 ans (une vieillarde, selon la vision russe des âges) a pris samedi l’avion pour Salekhard, capitale du district autonome de Iamalo-Nénétsie, avant de rouler jusqu’à Kharp, où se trouve l’IK-3, la colonie pénitentiaire où son fils a trouvé la mort.

Là, on l’a fait patienter deux heures avant de lui indiquer que le corps se trouve à la morgue de cette même ville de Salekhard. Maigre consolation : Mme Navlanïa a enfin reçu un document confirmant cette mort. Heure officielle du décès, le 16 février : 14 h 17, deux minutes avant la mise en ligne du communiqué annonçant l’événement. Entre deux portes, un responsable de la prison évoque un « syndrome de mort subite », diagnostic tout aussi douteux que la thrombose citée dès vendredi dans les médias officiels.

A Salekhard, la morgue dément avoir reçu le cadavre. Finalement, les autorités font savoir, dimanche, que les causes de la mort ne sont pas encore établies, et qu’aucune autre information ne sera disponible avant le courant de la semaine. Le média Novaïa Gazeta Europe, qui opère en exil, assure, en citant des sources locales, que le corps est bien à la morgue de Salekhard mais que personne, sur place, ne veut prendre la moindre initiative sans consigne claire de Moscou.

Eviter la foule aux funérailles

Entre-temps, il s’avère que le comité d’enquête fédéral a ouvert une inhabituelle « procédure de vérification ». Volonté de faire toute la lumière sur le décès de l’opposant de 47 ans ? L’hypothèse est douteuse, s’agissant d’un organe qui a toujours refusé d’ouvrir la moindre enquête sur l’empoisonnement d’Alexeï Navalny en 2020. Cette procédure permet surtout aux autorités de conserver le corps trente jours, voire plus si de nouvelles vérifications sont décidées. La famille aura-t-elle ensuite les moyens de mener sa propre expertise ?

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