A Porto Rico, le rêve sans cesse contrarié de la création du 51ᵉ Etat américain

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LETTRE DES CARAÏBES

Le centre gouvernemental Luis Muñoz Marin, à Dorado, Porto Rico, le 28 octobre 2024.

C’est une victoire aussi écrasante que symbolique pour Kamala Harris : à Porto Rico, la candidate démocrate à l’élection présidentielle américaine du 5 novembre s’est largement imposée, avec 73,4 % des voix, contre seulement 26,6 % pour Donald Trump, son adversaire du Parti républicain, pour un taux de participation de 57,5 %. Mais le résultat du scrutin, sur cette île hispanophone des Caraïbes, n’a eu aucune incidence sur l’issue de cette élection au niveau national.

En effet, il s’agissait d’un vote purement indicatif : bien que citoyens américains, les 3,2 millions d’habitants de ce territoire au statut ambigu d’« Etat libre associé » ne peuvent pas prendre part aux élections présidentielles, ni désigner d’élus siégeant au Congrès. Pour cette raison, souligne Luis Ayala de la Cruz, professeur d’histoire des Etats-Unis à l’université de Porto Rico, « de nombreux Portoricains estiment qu’ils sont traités comme des citoyens de seconde zone ».

Il s’agissait du premier scrutin de ce type organisé sur cette île des Grandes Antilles. « Bien que symbolique », ce vote a « permis de prouver que si Porto Rico devenait un Etat ce serait probablement un Etat démocrate », commente José Antonio Molinelli Gonzalez, professeur de sciences politiques à l’Université interaméricaine de Porto Rico.

Mais l’Etat libre associé pourra-t-il, justement, devenir un jour un Etat, le 51e de l’Union ? C’est, en tout cas, le souhait d’une majorité des électeurs portoricains. Dans l’ombre de l’élection présidentielle américaine, le 5 novembre, ceux-ci étaient invités à prendre part à plusieurs scrutins, dont un référendum sur l’évolution statutaire de leur île. Trois choix leur étaient proposés : le statut d’Etat américain, l’indépendance ou la souveraineté en libre association – telle que définie par les Nations unies et non pas sous sa forme hybride actuelle. Le premier choix est arrivé largement en tête, avec 56,9 % des suffrages, contre 31 % pour l’indépendance, pour un taux de participation de 57 %. Profondément impopulaire, le statu quo ne faisait pas partie des choix possibles.

« Traitement colonial »

Ce n’est pas la première fois que les Portoricains expriment dans les urnes leur souhait de faire de leur île la 51e étoile du drapeau américain. Le plebiscito du 5 novembre était le septième référendum de ce type à se tenir depuis les années 1960, dans cette ancienne colonie espagnole annexée par les Etats-Unis en 1898 et devenue, après l’adoption de sa Constitution, en 1952, un « territoire organisé non incorporé », selon la terminologie prosaïque qui a cours à Washington. Les trois consultations précédentes, en 2012, 2017 et 2020, s’étaient également soldées par une victoire du camp favorable à l’estadidad (« étatisation ») de cette île des Grandes Antilles.

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