Un détenu, le visage masqué, brandit une barre de fer. D’autres jouent au foot dans les coursives du premier étage, et se filment, hilares, levant les bras en guise de victoire, devant les portes ouvertes des cellules. A Mayotte, la mutinerie du centre pénitentiaire de Majicavo-Koropa, marquée par l’agression d’un surveillant et la prise d’otage d’un second, n’a duré que quelques heures avant l’intervention de l’antenne locale du Groupe d’intervention de la gendarmerie nationale, samedi 28 septembre. Mais les images filmées à l’intérieur par les jeunes émeutiers sont saisissantes.
Ces vidéos ont été largement diffusées dans l’île, où des barrages avaient été érigés par des collectifs en janvier dernier pour dénoncer l’insécurité quotidienne. Un abonné du réseau social X les a repostées avec l’objectif d’alerter le premier ministre, Michel Barnier, et le garde des sceaux, Didier Migaud, sur « Mayotte [qui] sombre encore dans l’extrême violence ». A la suite de ces violences, les agents pénitentiaires mahorais ont refusé de prendre leur service les dimanche 29 et lundi 30 septembre. Ils exigent que les meneurs, après qu’ils sont identifiés lors de l’enquête, soient transférés en métropole.
Cette émeute a frappé un établissement parmi les plus surpeuplés de France. L’administration pénitentiaire précise que les « taux de remplissage » étaient, le 26 septembre, de 191,5 % dans le quartier de la maison d’arrêt et de 286,8 % dans le centre de détention. A Majicavo, quatre détenus, voire cinq, s’entassent dans des cellules de 13,4 mètres carrés prévues pour deux. Plus de la moitié d’entre eux sont contraints de dormir sur des matelas installés par terre, comme l’a constaté, en mai dernier, Le Monde en se rendant à l’intérieur de la prison dans le cadre du droit de visite exercé par la sénatrice de Saint-Barthélemy, Micheline Jacques (Les Républicains, LR).
Cent détenus supplémentaires par an
« Cet établissement, ouvert en 2014, a été sous-dimensionné et a vieilli prématurément en raison de la surpopulation carcérale, déplore Vincent Pardoux, secrétaire régional FO Justice pour La Réunion et Mayotte. Les conditions de détention sont irréelles. Depuis plusieurs semaines, des détenus se plaignaient de problèmes d’eau, d’électricité et d’évacuation sanitaire. »
Tous les ans, en raison du nombre élevé d’affaires de violence avec armes, la population de la prison augmente en moyenne de cent détenus. Avec pour conséquence une « embolisation de tous les services de l’établissement », affirmait, en mai dernier, le chef d’établissement, Nicolas Jauniaux, qui se traduit par des problèmes d’accès aux terrains de sport, au service médical, au secteur scolaire, et par des difficultés à répondre aux demandes des détenus qui veulent travailler au sein de l’établissement.
Il vous reste 25.66% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.