à la frontière entre Haïti et la République dominicaine, les migrants haïtiens expulsés en masse

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« Voilà le premier bus », souffle Bazelais Joissaint, un travailleur humanitaire haïtien vêtu d’un polo aux couleurs de son organisation, le Service jésuite aux migrants (SJM). Après plusieurs heures d’attente aux abords de la rivière Massacre – qui sépare la ville frontalière de Ouanaminthe, en Haïti, et la commune de Dajabon, juste en face, en République dominicaine –, un autocar blanc s’engage lentement sur le pont qui enjambe le cours d’eau.

Devant les gardes-frontières dominicains, lourdement armés, l’autocar s’arrête face à la frontière, au milieu du pont. « Ça commence plus tard que d’habitude aujourd’hui : en général, c’est plutôt vers midi ou 2 heures de l’après-midi », observe Bazelais Joissaint, qui chapeaute une équipe de bénévoles du SJM. Après une matinée torride en ce mardi d’octobre, l’orage menace. Des bourrasques poussiéreuses rendent l’atmosphère oppressante.

Vingt femmes et neuf enfants, tous haïtiens, descendent de l’autocar, où ils avaient été embarqués à Santiago de los Caballeros, la deuxième ville de République dominicaine, à environ trois heures de route. Quelques-unes de ces migrantes reconduites à la frontière portent une valise ou un petit sac, mais la plupart ne possèdent aucun bagage. Les bénévoles de plusieurs organisations s’affairent autour des expulsées, prodiguant conseils et informations. Malgré les cris et la confusion ambiante, la procédure semble bien rodée.

Visages hagards

Coup sur coup, deux fourgons blancs du service du Control migratorio (« contrôle migratoire ») se présentent de l’autre côté du pont, jusqu’à la ligne de démarcation. Plus d’une centaine de rapatriés de force – hommes, femmes et enfants – émergent de l’arrière des deux véhicules. Les visages sont hagards, les habits, trempés de sueur : il a dû faire une chaleur suffocante dans ces boîtes sombres, équipées de minuscules fenêtres. « Les bus, c’est pour les femmes et les enfants. Les hommes, on les met toujours dans des camions », résume Bazelais Joissaint. Puis, le trafic transfrontalier peut enfin reprendre pour quelques heures, jusqu’à l’arrivée du prochain convoi.

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