à Kherson, les drones russes sèment la terreur

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Depuis sa libération il y a deux ans, la ville de Kherson, dans le sud de l’Ukraine, est rongée par les attaques aériennes quotidiennes venant de la rive d’en face, toujours occupée par l’armée russe. Ernest Safonov, 57 ans, gare sa camionnette sous la canopée des arbres et descend d’un pas vif les quelques centaines de mètres vers sa maison, elle-même située à 300 mètres du Dniepr. Il n’y a pas un chat en cette fin d’après-midi de mi-novembre. L’employé du service culture de la mairie veille à garder ses pieds sur l’asphalte « à cause des mines [antipersonnel] Lepestok que les Russes lancent sur la ville de leurs drones. Elles sont très bien camouflées ». De l’autre côté du Dniepr, on distingue la rive gauche, toujours occupée par l’armée russe. « Heureusement qu’il n’y a plus de sniper en face », dit-il en atteignant son pavillon, dans un quartier marqué par de nombreux impacts de projectiles et en apparence complètement déserté.

Le vrombissement d’un drone quadrirotor se fait entendre. Ernest bondit contre le mur de sa maison et scrute le ciel, crispé par la peur. Le son change de tonalité, signalant que le drone se déplace à proximité. Au bout de quelques dizaines de seconde d’angoisse, le son disparaît. « Si c’est un drone ennemi, il larguera sa charge plus loin et retournera vide vers son pilote », explique Ernest, qui a déjà retrouvé son calme. Il exhibe un quadrirotor russe tombé à proximité de sa voiture cet été, après avoir échoué à faire exploser sa grenade. « Je pense que Kherson est une zone d’entraînement pour les pilotes de drones russes. Ils s’entraînent sur nous, les civils, avant de partir au combat. Ici, nous appelons ça le “safari”. »

Ernest sort de l’abri qu’il a aménagé dans le sous-sol de sa maison située sur la rive droite du Dniepr. A Kherson (Ukraine), 11 novembre 2024.
Pour se protéger des attaques de drones lors de ses déplacements en voiture, Ernest a installé dans celle-ci un analyseur de spectre radio qui détecte les drones dans un rayon de 10 kilomètres. A Kherson (Ukraine), le 11 novembre 2024.
Ernest, dans l’abri qu’il a aménagé dans le sous-sol de sa maison, où il a vécu durant huit mois après la libération de la ville par l’armée ukrainienne en novembre 2022. A Kherson (Ukraine), le 11 novembre 2024.

Entre la berge du Dniepr et la rue Perekopska, une bande de 800 mètres de large est désertée. Les stigmates de bombardements sont partout visibles. Il n’y a personne dans les rues, et si un véhicule passe par là, il roule à tombeau ouvert. Mais le danger va bien au-delà. Cet été, lorsque les attaques de drones contre les civils ont atteint leur pic, une chaîne Telegram russe consacrée aux attaques sur Kherson a publié une carte de la ville aux trois quarts rouge pour désigner une « zone interdite ». « Tout véhicule circulant dans cette zone est une cible légitime », répète quasi quotidiennement la chaîne Telegram « De Marioupol aux Carpates », animée par des blogueurs militaires russes, illustrant ses propos de vidéos de lâchers de grenades par drone sur des véhicules civils et parfois sur des piétons.

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