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A mesure que la crise sociale et politique s’amplifie, l’éducation semble revenir au cœur des préoccupations politiques. Nous, membres de la communauté éducative et représentants des usagers du service public, aurions pu nous en réjouir, si seulement les discours plaidaient en faveur d’une amélioration des conditions d’apprentissage et du bien-être des élèves.
Il n’en est rien, du président de la République au ministre de l’éducation nationale, et jusque sur les bancs du Sénat, un seul mot d’ordre, jamais assumé mais toujours présent : la privatisation de l’éducation et la transformation de l’école publique en entreprise. En dépit des annonces de moyens supplémentaires, qui d’ailleurs n’arrivent guère, le ministère de l’éducation nationale allant même jusqu’à renoncer régulièrement à une partie du budget qui lui avait été alloué par la représentation nationale.
La seule et unique obsession de nos gouvernants est de faire des économies et de réduire le niveau de la dépense publique, enfin, des dépenses en faveur de l’éducation publique. Car lorsqu’il s’agit de l’éducation privée sous contrat, fût-elle confessionnelle, alors les contraintes budgétaires, comme les discours sur la laïcité, semblent s’effacer derrière d’autres priorités.
A celles et ceux qui agitent le chiffon rouge d’une nouvelle guerre scolaire, nous répondons que celle-ci n’a jamais cessé. L’enseignement privé sous contrat bénéficie de privilèges au détriment de l’enseignement public et participe activement à une mise en concurrence déloyale.
Libéralisation inéluctable
La novlangue de la « start-up nation » nous a habitués à ses anglicismes abscons, et pourtant, les mots qui manquent dans ces discours sont ceux du « new public management ». Transformer l’école en entreprise comme les autres, tel est le projet qui se dessine en creux.
L’objectif peut alors apparaître à qui veut le voir : une fois les établissements scolaires publics et privés soumis aux lois de la concurrence et de la compétitivité, la libéralisation du marché de l’éducation deviendra « inéluctable » (comme ce fut le cas pour les télécommunications, le rail, etc.).
Ainsi, des entrepreneurs politiques essaient déjà de faire de l’éducation un investissement rentable, aussi bien pour les acteurs économiques que pour eux-mêmes. Mais lorsque l’on s’attaque à l’éducation, ce n’est rien d’autre que la République elle-même que l’on atteint dans ses fondements. L’école est la fabrique des citoyennes et citoyens de demain et le creuset de nos libertés collectives. A l’heure où l’on redécouvre les ravages de la propagande et de la haine en politique, il est plus urgent que jamais de soigner notre jeunesse et de lui garantir une égalité de droit et un avenir meilleur.
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