Emmanuel Macron a décidé de nommer Thierry Breton au poste de commissaire européen, dans le prochain exécutif de l’Union européenne (UE) qui devrait prendre ses fonctions le 1er novembre. Jeudi 27 juin, le président français en a informé les autres dirigeants libéraux – le premier ministre belge, Alexander De Croo, le Néerlandais Mark Rutte, l’Estonienne Kaja Kallas, mais aussi le président du Conseil, Charles Michel – juste avant la réunion des chefs d’Etat et de gouvernement européens, qui se tenait jeudi après-midi à Bruxelles, comme l’ont indiqué au Monde des sources concordantes.
M. Macron leur a dit son intention de faire part de son choix aux chefs d’Etat et de gouvernement des Vingt-Sept, réunis pour, entre autres, reconduire Ursula von der Leyen à la tête de la Commission européenne. Thierry Breton, qui était présent lors de cette annonce, a remercié le président français de sa confiance.
La situation française a sans conteste joué dans cette décision. Il s’agit, pour le chef de l’Etat, de défendre ses prérogatives en matière de politique européenne, dans l’hypothèse d’une cohabitation avec le Rassemblement national (RN), à trois jours du premier tour des élections législatives, dimanche 30 juin. Ces derniers jours, Jordan Bardella avait assuré que la nomination du commissaire français serait l’apanage du premier ministre, ce que contestait l’Elysée au nom d’un « domaine réservé » du chef de l’Etat. En annonçant son choix avant même le premier tour, alors que le RN est donné en tête dans les enquêtes d’opinion, Emmanuel Macron prend les devants, quels que soient les résultats électoraux.
Poser des jalons
En annonçant jeudi son souhait de nommer Thierry Breton, Emmanuel Macron veut aussi poser des jalons au moment où Ursula von der Leyen, qui devrait être reconduite, est pressée de toutes parts de donner des postes importants. Notamment par Giorgia Meloni, la présidente du conseil italien, qui compte bien monnayer au mieux son soutien à l’ancienne ministre d’Angela Merkel.
Paris souhaite un poste de vice-président exécutif de la Commission qui aurait la main sur les dossiers industriels de toutes sortes, de la défense au numérique en passant par les technologies vertes. Cela fait des mois que l’Elysée en imagine les contours avec Thierry Breton, sans pour autant garantir à ce dernier qu’il en serait le titulaire. « Il a fait le job, il est réaliste et pragmatique », juge Valérie Hayer, la présidente du groupe Renew.
« Il fallait aussi quelqu’un pour marquer Ursula von der Leyen “à la culotte” », explique une source européenne, alors que la présidente de la Commission, une fois renommée, pourrait être moins sensible aux desiderata de la France dans les prochains mois. Entre les élections fédérales allemandes, prévues en 2025, qui pourraient voir ses amis de la CDU revenir au pouvoir, et un gouvernement français qui pourrait être très affaibli, voire dirigé par le Rassemblement national, son barycentre politique pourrait être plus allemand et plus à droite. Thierry Breton a montré, ces dernières années, qu’il ne ménage pas Ursula von der Leyen, quitte à l’exaspérer. Reste à savoir ce qu’en dira la présidente de la Commission, à qui appartiennent la décision finale et le choix du portefeuille.