« La chute de Bachar Al-Assad en Syrie fin 2024 est le point d’arrivée, incertain, d’un cycle de soulèvements et de répressions parti de Tunisie, il y a quinze ans »

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Le 8 décembre marquera le premier anniversaire de la chute de Bachar Al-Assad en Syrie. La piteuse fuite de ce dernier à Moscou n’a pas seulement sonné la fin de l’une des pires dictatures du Proche-Orient, terreau il est vrai fécond de l’autoritarisme. Elle a également été le point d’arrivée, encore incertain, d’un cycle de soulèvements et de répressions parti de Tunisie, il y a quinze ans, après le choc provoqué par l’immolation d’un jeune vendeur ambulant, Mohamed Bouazizi, alors en butte à l’arbitraire du régime de Zine El-Abidine Ben Ali, en décembre 2010.

Premier exemple de mobilisation horizontale et immédiate par le truchement de réseaux sociaux synonymes de liberté retrouvée, face à des systèmes politiques nord-africains et proche-orientaux verrouillés et exsangues, la vague des « printemps arabes » a déferlé pendant l’année 2011. Elle a déboulonné successivement les potentats tunisien, égyptien et libyen, mais sans pouvoir offrir en héritage beaucoup plus que leurs pierres tombales. Après un exil peu glorieux pour Zine El-Abidine Ben Ali ; un passage en prison encore plus humiliant pour Hosni Moubarak ; et un lynchage sordide pour Mouammar Kadhafi.

Propulsé à la tête de la Syrie une décennie plus tôt, Bachar Al-Assad aurait pu connaître un autre sort s’il avait pu se montrer capable de dépasser un atavisme politique fait de tortures et de culs-de-basse-fosse. C’était évidemment demander l’impossible, comme l’a montré la guerre civile que le président syrien a préféré infliger à son peuple plutôt que de partager le pouvoir. Après le temps des espérances est venu celui de la réaction autoritaire, vite soutenue par les monarchies du Golfe. Ces dernières avaient été échaudées par les succès électoraux de la seule force politique structurée, les partis se revendiquant de l’islam politique, enregistrés lors des élections organisées en Tunisie, en Egypte et en Libye.

Epitaphe paradoxale

Qu’elles appartiennent à la mouvance des Frères musulmans ou bien se rattachent à des courants salafistes, ces formations avaient mis en évidence les limites des mobilisations horizontales citoyennes où les libéraux pouvaient faire entendre leur voix. Que ce cycle se soit achevé en Syrie, il y a un an, par la victoire éclair d’un ancien djihadiste, Ahmed Al-Charaa, qui professe une vision conservatrice de la société syrienne à peine atténuée par la diversité communautaire de cette dernière, apparaît comme une épitaphe paradoxale.

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