Cessez-le-feu au Proche-Orient : l’avertissement de Gaza

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Le brusque accès de violence qui a saisi Gaza dimanche 19 octobre a valeur d’avertissement. Moins d’une semaine après la mise en scène par Donald Trump d’un succès aussi incontestable dans l’immédiat qu’incertain pour l’avenir dans le conflit israélo-palestinien, les nouveaux morts palestiniens et israéliens et l’interruption de l’acheminement de l’aide humanitaire rappellent ce qui peut advenir lorsque les deux protagonistes sont livrés à eux-mêmes.

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Certes, le retour dans la région des émissaires personnels du président des Etats-Unis, son gendre Jared Kushner et Steve Witkoff, montre que la Maison Blanche a bien pris la mesure du défi que constitue la relance d’un processus qui pourrait permettre, sous conditions, l’éventuelle création d’un Etat palestinien, mais la tâche qui les attend est redoutable.

Une chose est de parvenir à imposer un cessez-le-feu et la libération des derniers otages israéliens encore retenus à Gaza. Une autre est de traduire dans les faits les points du plan présenté le 29 septembre qui comprennent la mise en place d’une force internationale et d’une structure visant à la fois à accompagner le désarmement impératif du Hamas et à instaurer l’ordre tout aussi indispensable au chantier titanesque de la reconstruction d’une bande de terre anéantie par les bombardements israéliens.

Premier pas encourageant

Il en va de même avec le retrait tout aussi nécessaire de l’armée israélienne, qui continue d’occuper une bonne partie de l’étroite bande de terre. Les imprécisions du plan et ses nombreuses carences, à commencer par l’absence du moindre calendrier, ou celle de toute mention de la Cisjordanie, théâtre d’une colonisation israélienne de plus en plus agressive, peuvent être de nature à le faire dérailler à tout instant.

Des soldats israéliens se déplacent le long de la frontière entre Israël et Gaza, le 21 octobre 2025.

Pour réussir, Donald Trump, qui a associé son nom, pour le meilleur et pour le pire, à ce plan de paix pour Gaza, ne dispose pourtant pas nécessairement des forces nécessaires. Les purges et les départs qui ont affecté le département d’Etat depuis son retour aux affaires ont ainsi privé la diplomatie américaine d’experts chevronnés. L’expérience désastreuse et sanglante de la Gaza Humanitarian Foundation, mise sur pied conjointement par les Etats-Unis et Israël pour distribuer des vivres pendant les combats, a décrédibilisé le recours à des contractuels sans connaissance du terrain, et souligné par contraste la valeur des agences des Nations unies écartées par I’Etat hébreu.

Le sommet réunissant de nombreux chefs d’Etat et de gouvernement organisé à Charm El-Cheikh, en Egypte, le 13 octobre, pour saluer la fin d’une guerre meurtrière de deux ans a été un premier pas encourageant. Cette internationalisation de la question de Gaza mérite d’être confortée. La traduction du plan de paix pour Gaza en résolution des Nations unies qui susciterait assurément un vote unanime d’un Conseil de sécurité enfin à l’unisson de l’Assemblée générale ne pourrait que renforcer ses chances de succès.

Il s’agirait certes d’un retour aux mécanismes d’un multilatéralisme que Donald Trump s’est efforcé avec constance de piétiner depuis son retour à la Maison Blanche, mais l’opportunisme peut favoriser le pragmatisme. Washington ne pourra pas réussir s’il n’est pas soutenu activement par les puissances de la région, d’ailleurs prêtes à s’impliquer pour parvenir enfin à un début de stabilisation du Proche et du Moyen-Orient. Or le temps est compté.

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Le Monde

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