Les ratés de la méritocratie heurtent la justice

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Dans son livre Pour une justice aux 1 000 visages (L’Aube, 176 pages, 17 euros), Youssef Badr, 44 ans, magistrat au tribunal de Bobigny, ne se contente pas de dresser un constat impitoyable de l’échec de la mixité sociale au sein des professions du droit ; il tisse aussi le récit émouvant d’un parcours de vie aidé par une improbable série de coups de baguette magique.

Il entend ainsi montrer ce qu’il faut de bonne volonté et de hasard pour faire fonctionner la méritocratie. Car embrasser une carrière de magistrats n’a jamais fait partie des possibles envisagés par ce fils de parents marocains, arrivés en France à la fin des années 1960. Après avoir pensé intégrer une école de commerce (pour gagner de l’argent afin de soulager au plus vite sa famille), il s’inscrit finalement en fac de droit sans trop y penser. Pour autant, il n’envisage pas de devenir juge, la faute à un concours réputé impossible à franchir.

Sans le secours d’un professeur de procédure civile et d’un magistrat, qui décident tous les deux de le prendre sous leur aile et de l’aider à se préparer au concours de l’Ecole nationale de la magistrature, Youssef Badr n’aurait jamais été juge. Commence alors le long apprentissage d’un décalage, parfois violent, qui lui rappelle en permanence qu’il n’occupe pas la place qu’on attend de lui. Dans ce livre témoignage, il trace quelques perspectives qui pourraient conduire à une révolution sociologique de la magistrature, et appelle de ses vœux la formation d’une justice qui ressemblerait enfin aux gens qu’elle juge.

« Pour une justice aux 1 000 visages », de Youssef Badr, L’Aube, 176 pages, 17 euros.



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