La bonne nouvelle moldave

2820


Sur les marches orientales de l’Union européenne (UE), théâtre d’une virulente bataille d’influence entre pro-européens et prorusses, les bonnes nouvelles sont d’autant plus appréciables qu’elles sont rares. Placée entre une Ukraine en guerre et une Roumanie tout juste sortie d’une présidentielle dramatisée par une forte poussée de l’extrême droite, la Moldavie vient pourtant de confirmer sa volonté de s’engager dans le long processus d’intégration dans l’UE, à l’occasion des élections législatives du 28 septembre.

A Chisinau, cette échéance suscitait l’expectative. Le camp pro-européen, incarné par la présidente Maia Sandu, redoutait un vote sanction lié aux difficultés économiques que traverse le pays. Ces dernières peuvent s’expliquer notamment par le renchérissement des prix de l’énergie à la suite de la coupure par le géant russe Gazprom, au cœur de l’hiver, de l’approvisionnement en gaz de la région séparatiste de Transnistrie, d’où provenait la majorité de l’électricité moldave, avant que les autorités ne se donnent des marges de manœuvre grâce à la connexion au réseau européen. La volonté de Maia Sandu de monopoliser le projet d’adhésion alimentait également la frustration de responsables partageant cet objectif mais désireux de conserver leur autonomie.

Les élections s’annonçaient à ce point indécises qu’en septembre le président français, Emmanuel Macron, le chancelier allemand, Friedrich Merz, et le premier ministre polonais, Donald Tusk, avaient jugé nécessaire de faire le déplacement à Chisinau à l’occasion des commémorations de l’indépendance du pays. Sans majorité claire au Parlement, le Parti action et solidarité (PAS), pro-européen, aurait en effet été contraint de former une coalition incertaine avec des partis d’opposition. Une instabilité aurait pu déboucher sur de nouvelles élections anticipées, plaçant le pays dans l’incapacité de faire adopter les dizaines de textes législatifs nécessaires à une entrée dans l’UE, notamment la mise en conformité de son système judiciaire.

La présidente moldave, Maia Sandu, après l’annonce des résulstats des élections législatives, à Chisinau, le 29 septembre 2025.

En dépit des dénégations russes, la Moldavie a été la cible d’une campagne massive de désinformation et de mensonges à laquelle s’est mêlée l’extrême droite roumaine. Dans le même temps, les médias indépendants et les organisations pro-démocratie subissaient de plein fouet la suppression brutale par l’administration de Donald Trump des aides assurées jusqu’à présent par les Etats-Unis. Instruites par les précédents du référendum sur le choix européen et la présidentielle de 2024, les autorités moldaves redoutaient également des achats de voix massifs à l’instigation de proches du Kremlin. Un résultat serré aurait été également propice à une contestation des résultats dans la rue.

L’opposition prorusse a bien crié à la fraude électorale dès l’annonce des résultats, mais ses appels à manifester sont restés vains dans l’immédiat. Certes en retrait par rapport aux élections de 2021, le camp pro-européen reste néanmoins solidement aux commandes à Chisinau. Cette bonne surprise pourrait toutefois être rapidement tempérée par les résultats des élections législatives prévues les 3 et 4 octobre en République tchèque. Donné favori, le milliardaire populiste Andrej Babis, premier ministre de 2017 à 2021, s’est depuis converti à un souverainisme agressif et s’oppose à toute aide militaire à l’Ukraine.

Lire aussi l’analyse | Article réservé à nos abonnés L’Europe saisie par le trumpisme

Le Monde

Réutiliser ce contenu



Source link