La flottille Global Sumud pour Gaza part enfin de Tunisie, après avoir subi deux attaques de drones

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Un bateau de la Global Sumud Flotilla, à Bizerte, en Tunisie, le 13 septembre 2025.

C’est au petit matin du mardi 16 septembre que le Yamen, l’un des derniers bateaux de la délégation maghrébine de la Global Sumud Flotilla (GSF) – une flottille humanitaire internationale pour Gaza –, a quitté le port de Sidi Bou Saïd, dans la banlieue nord de Tunis, en direction des eaux internationales. A son bord, une dizaine de participants, majoritairement tunisiens, avaient finalisé les dernières démarches dans la nuit avant de prendre la mer pour rejoindre le reste du convoi.

Au total, un peu moins de 30 embarcations transportant quelques centaines de participants venus de plus de 44 pays – militants, députés, médecins, journalistes ou personnalités publiques telles que l’actrice française Adèle Haenel ou Mandla Mandela, petit-fils du leader sud-africain Nelson Mandela –, ont quitté les ports tunisiens au terme de plus d’une semaine mouvementée.

Partie officiellement de Barcelone le 31 août, la flottille n’avait accosté à Tunis que le 7 septembre en raison des conditions météorologiques et d’incidents techniques, avant d’être de nouveau retardée par deux attaques de drones – que les organisateurs imputent à Israël –, divers problèmes techniques et une météo défavorable. Une vingtaine de bateaux ont fini par quitter les eaux territoriales tunisiennes dans la nuit de lundi à mardi. Près d’une dizaine d’embarcations supplémentaires sont parties de Tunis, lundi soir et mardi matin, en direction de Malte, où 17 bateaux de la délégation amarrés en Sicile doivent les rejoindre.

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« Pressions internationales »

Les organisateurs estiment la traversée jusqu’à Gaza à deux semaines. Ils devraient également être rejoints dans les prochains jours par des bateaux partis de Grèce. En tout, une cinquantaine d’embarcations doivent naviguer ensemble dans l’espoir de briser le blocus imposé à la population gazaouie par Israël.

Pour les militants arrivés à Tunis le 7 septembre, ce départ met fin à plusieurs jours d’incertitudes. Lundi soir, alors que son navire se trouvait encore au large de la Tunisie dans l’attente des retardataires, Prune, une activiste française embarquée à bord du Spectre, évoquait, outre les « défis techniques » liés à l’état des embarcations, « ce qui semble être de grosses pressions internationales » ainsi que des « défis de sécurité » consécutifs aux attaques de drones sur deux des principaux navires, les 8 et 9 septembre.

Parmi les embarcations visées figurait le Family, censé transporter les membres du comité directeur de la GSF ainsi que des personnalités publiques telles que la militante suédoise Greta Thunberg ou l’eurodéputée franco-palestinienne Rima Hassan. Embarrassées, les autorités tunisiennes avaient d’abord nié toute agression, évoquant un incendie dû à une cigarette ou un briquet, avant d’être contraintes de reconnaître une « agression préméditée » à la suite de la seconde attaque, sans toutefois en préciser la nature ni les auteurs.

Alors que l’arrivée de la flottille internationale avait suscité un véritable engouement en Tunisie – où la cause palestinienne occupe historiquement une place centrale –, les deux attaques ont provoqué un revirement chez les partisans du régime de Kaïs Saïed, inquiets de la présence prolongée de dizaines de bateaux perçus comme une menace pour la sécurité nationale. Riadh Jrad, fervent soutien du chef de l’Etat et figure médiatique proche du pouvoir, considéré comme un relais officieux du régime en l’absence de communication officielle, avait accusé les organisateurs de la flottille et certains médias de vouloir « nuire à l’Etat tunisien » et de « semer le doute sur les capacités et la vigilance (…) de ses institutions sécuritaires et militaires ».

Campagne de dénigrement

Il a ainsi lancé une campagne de dénigrement à laquelle ont pris part d’autres soutiens du régime, remettant en cause les intentions des participants, accusés d’agir contre les intérêts de la Tunisie. De son côté, la députée Fatma Mseddi a mis en doute les financements de l’organisation tunisienne de la flottille, appelant à l’ouverture d’une enquête. Pour garantir leur départ, les organisateurs ont préféré temporiser. Ils se disent reconnaissants envers les autorités tunisiennes pour leur accueil, estimant que d’autres pays de la région n’auraient jamais permis une telle mission sur leur territoire.

La GSF s’inscrit dans la continuité de deux précédentes tentatives militantes de briser le blocus de Gaza. En juin et juillet, deux navires de la Flottille de la liberté, le Madleen et le Handala, avaient été interceptés par Israël dans les eaux internationales, avant d’atteindre leur destination. Leurs passagers avaient été arrêtés, détenus quelques jours en Israël, puis expulsés. En mai, le Conscience avait été visé par deux drones en haute mer au large de Malte. L’attaque, également attribuée à Israël par les organisateurs, avait provoqué un incendie et une brèche à l’avant du bateau. Aucun blessé n’avait été signalé.

En mai 2010, une flottille internationale composée de six navires avait connu une issue bien plus dramatique. L’intervention de l’armée israélienne en haute mer contre le Mavi Marmara avait causé la mort de dix militants turcs, déclenchant une vague de condamnations internationales. L’incident avait provoqué une crise diplomatique majeure entre Israël et la Turquie et relancé le débat sur la légalité du blocus de Gaza.

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